AMRF : les communes rurales, creuset de la revitalisation démocratique du pays ?

Le Congrès national des maires ruraux de France (27-29 septembre) ouvre une fenêtre sur un monde en pleine mutation, dans lequel les maires des communes rurales comptent bien faire entendre la voix du bon sens et de la proximité.

Le Congrès national des Maires ruraux de France (AMRF) a lieu à Saint-Julien tout le week-end. © Arnaud Morel / DijonBeaune.fr

Ce vendredi 27 septembre, la salle intergénérationnelle de Saint-Julien, à 7 km de Dijon, accueillait l’ouverture officielle du Congrès national des maires ruraux de France. Pour l’occasion, le président du sénat, Gérard Larcher a fait le déplacement, entouré par François Sauvadet, président du Conseil départemental de Côte-d’Or, François Rebsamen, le président de Dijon Métropole, et Marie-Guite Dufay, présidente de la région Bourgogne-Franche-Comté. Mais les vraies stars étaient ailleurs, en la personne de Michel Fournier, président de l’Association des Maires Ruraux de France (AMRF), celle de Bruno Bethenod, le boss de l’AMR21 et Michel Lenoir, maire de la commune hôte, Saint-Julien.

« Nous, maires de communes rurales, représentons la gestion de proximité, en prise avec les réalités du terrain que l’État semble parfois oublier », a commencé Bruno Bethenod qui croit dur comme fer au duo commune département pour faire prévaloir le bon sens sur une certaine technocratie hors sol. L’édile met le doigt sur le grief le plus récurrent relevé par les centaines de maires présents pour le congrès et résumé habilement par Michel Fournier : « l’administration se montre souvent plus tatillonne qu’aidante. Et l’imagination administrative, en la matière, est sans borne. Aujourd’hui, le jeu politique national nous dépite, le pays, l’État et le gouvernement doivent plus faire confiance à cette France des communes, qui regorge de bon sens », note-t-il.

« La commune est l’exemple même de la capacité à rassembler »

Gérard Larcher abonde, lui qui préside l’assemblée représentant les territoires du pays. « La commune constitue le socle du pays, réellement, quelle qu’en soit la taille. Et c’est à partir de ce lien de proximité que l’on pourra renouer avec la confiance des Français. La commune est l’exemple même de la capacité à rassembler. On y débat, on peut même s’y engueuler, mais on y travaille surtout pour l’intérêt général », estime-t-il.

Or, estiment les maires des communes rurales, l’État les dépossède de leurs moyens d’actions, en les privant de ressources financières en supprimant la taxe d’habitation, en les soumettant à une réglementation contraignante et en les obligeant à s’inscrire dans un cadre d’intercommunalité qui achève de réduire leurs marges de manœuvre.

Lors d’un débat sur le thème de « la commune rurale, socle de la France », de très nombreux maires ont pris la parole pour abonder dans ce sens. « On nous a enlevé l’argent et le droit. Les intercommunalités nous ont pris notre pouvoir de délibération. L’élu communal tisse le lien social, mais doit aussi pouvoir produire du droit. Redonnons la possibilité aux communes de pouvoir quitter leur intercommunalité », estime l’un d’eux. L’AMRF, d’ailleurs milite pour imposer un cadre bien plus souple, sur une base contractuelle, à la coopération intercommunale, qui reste nécessaire pour mutualiser les moyens, par exemple, en matière de gestion de l’eau ou des ordures ménagères.

Au sein des communes rurales, un monde s’invente, un monde qui a du sens, et le sens du concret. « Faire vivre le collectif communal, qui souvent dispose de peu de moyens, impose de l’inventivité mais redonne au citoyen prise sur sa vie et son environnement », assure Fanny Lacroix, maire de Châtel-en-Trièves et vice-présidente de l’AMRF.

« Il faut donner aux gens l’envie de s’engager dans leur commune »

Face à ces maires, les élus métropolitains, départementaux et régionaux semblent parfois un rien hors sol. Mais tous s’accordent pour critiquer les déclarations de l’ancien ministre de l’économie qui estimait que le dérapage budgétaire français était imputable… aux collectivités locales. « Ma colère est grande d’entendre ça », lance Marie-Guite Dufay. François Rebsamen ne dit pas autre chose et aimerait « que l’État s’applique à lui-même les bonnes pratiques de gestion des collectivités locales, qui sont à l’équilibre budgétaire ». « L’État nous prive de moyens, et fait peser sur nous des obligations, notamment en matière sociale, toujours plus lourdes. C’est une situation invraisemblable », tonne François Sauvadet.

La révolte s’organise. « Nous allons renverser positivement la table et mettre en avant le potentiel extraordinaire des 35 000 communes françaises. Nous, les maires, sommes les faiseurs du quotidien », assure Michel Fournier, le président de l’AMRF. Les maires demandent, notamment, la mise en place d’un vrai statut de l’élu local, qui lui confère une protection équivalente à celle des policiers ou des gendarmes. Important alors que montent les incivilités. Autre exigence, celle d’une revalorisation des fonctions de secrétaire de mairie, un poste aussi essentiel que peu valorisé. « Il y a urgence. Il faut donner envie aux gens de s’engager dans leur commune pour ne pas aller au devant d’une grosse déconvenue lors des prochaines élections municipales de 2026 », conclut Michel Fournier.

🇫🇷 Congrès national des Maires ruraux de France 2024 – 27, 28 et 29 septembre à Saint-Julien et Arceau – Programme complet ici