L’année démarrait sous la bonne étoile du Michelin retrouvée, puis l’uppercut Covid-19 a frappé l’établissement de Pernand-Vergelesses. Sonné mais pas à terre, le chef Laurent Peugeot a réagi en créant un drive avec ses producteurs et une formule de plats à emporter. Sacré Charlemagne !
Propos recueillis par Eric Perruchot
Après l’annonce d’un déconfinement prudent, les cafés, hôtels et restaurants n’ont été pas les mieux servis. Restez-vous optimiste en ce qui concerne Le Charlemagne ?
Je ne crois pas au 2 juin comme date d’une possible réouverture. Et même si c’était le cas, la question fondamentale reste : est-ce que je vais pouvoir réouvrir ? Tous mes restaurants à l’étranger sont bloqués jusqu’en septembre. C’est-à-dire 100% de ma clientèle touristique.
Comment envisagez-vous les choses ?
Je ne peux pas rester sans rien faire. En 48 heures, après l’annonce du confinement, j’ai monté un Charlemagne Drive avec mes fournisseurs qui ne pouvaient plus écouler leurs marchandises sur les marchés ni auprès des restaurateurs. Depuis jeudi 23 avril, nous proposons aussi des plats à emporter précommandés. Avec une petite équipe, la distribution des commandes se fait désormais tous les jours de 10h à 13h au Charlemagne, sauf le lundi. Aujourd’hui (ndlr, jeudi 30 avril), par exemple, nous avons reçu une vingtaine de personnes qui préviennent de leur arrivée par SMS. Nous organisons aussi les livraisons par camionnette frigorifique pour ceux qui ne peuvent venir jusqu’à Pernand.
Le « Charlemagne Drive », c’est comme un mini-marché, en fait…
On y trouve tous les produits des fournisseurs avec qui je travaille en temps normal : la ferme du Poiset, les légumes de Joël Thiébault, les fraises et artichauts de Vert’tiges, les asperges du domaine Bonnardot, les fromages de la ferme Biquettes et de la ferme de Changey, les viandes de Guillaume Verdin ou les pigeons de Patrice Sanchez… Tout un assortiment de produits locaux et de saison.
« Je réfléchis à des solutions pour juillet et août : peut être ouvrir seulement une partie du restaurant, avec une cuisine très simple et pas plus de 10 personnes en terrasse. »
Comment se passe la distribution ?
Pour que tout soit prêt dès le matin, les fournisseurs apportent leurs cagettes la veille au soir. En attendant le moment de la distribution, je cuisine mes plats, conditionnés sous vide. Regardez ces côtes de porcs fermiers ! Un vrai régal de 300 grammes, avec deux centimètres de bonne graisse, et pas plus chères que dans une grande surface. Je pense évidemment poursuivre l’opération après.
Comment envisagez-vous la sortie de crise pour le restaurant ?
Je ne le cache pas, c’est un gros soucis. Les mois de juillet et d’août représentent 70% de clientèle touristique et un gros pourcentage du chiffre d’affaires. Aujourd’hui, en toute honnêteté, ma réflexion est plutôt tournée vers la remise en route ou non des restaurants avec les normes exigées de déconfinement. Le Charlemagne est un restaurant gastronomique, où les tables sont déjà espacées l’une de l’autre. Nous pouvons facilement nous adapter. Mais devoir accueillir seulement 10 clients par jour au maximum… je ne tiendrai pas six mois ! Je réfléchis à des solutions pour juillet et août : peut être ouvrir seulement une partie du restaurant, avec une cuisine très simple et pas plus de 10 personnes en terrasse.
Ce n’est plus un scoop, les notions de proximité et de terroir se renforcent…
Nous avons toujours travaillé dans ce sens-là, avec des normes d’hygiène extrêmement sévères. L’important est de garder le contact avec notre clientèle fidèle et nos producteurs locaux qui ont un talent fou, le goût de bien faire et le sens du partage. D’où le lancement du Charlemagne Drive et de continuer sur cette lancée.