Les réseaux sociaux et les géants du web font du beurre avec nos données. Mais on peut aussi en faire de l’art, au service de tous, entend montrer la spectaculaire exposition 1,2,3 DATA qui se tient jusqu’au 24 janvier 2022, au musée de la Vie bourguignonne à Dijon.
Comment rendre visible et intelligible le flot de données qui caractérise notre monde ? Comment donner corps à la notion de big data, ces masses de données invraisemblables qui ne disent rien en tant que telles mais recèlent, une fois croisées, d’immenses potentialités, positives et négatives ? À ces questions, 1,2,3 DATA porte une réponse artistique et plastique.
Inscrite dans le Festival des Transitions écologiques et numériques, l’expo, produite par la Fondation Groupe EDF, présente, au sein d’une vaste salle du musée, une douzaine d’œuvres de « Data Artists ». Celles-ci mettent en forme des données environnementales, sociales, sociologiques diverses. Les procédés de restitution sont variés : écran interactif, projection vidéo grand format, panneaux animés ou vastes illustrations. « Tout l’enjeu de cette exposition est de rendre le big data compréhensible par le grand public. Celui-ci doit prendre conscience qu’il produit toutes ces données, mais qu’il est aussi possible de se les approprier pour en tirer des enseignements », décrypte Nicolas Menuel, directeur pédagogique à l’Esadd, l’École supérieure appliquée au design et au digital de Dijon.
Cartographie animée
Une œuvre intéressera spécifiquement les habitants de la métropole dijonnaise : une représentation cartographique et animée présentant, sur une année, jour après jour, différentes données comme la consommation énergétique des bâtiments publics, les températures et taux d’humidité ou encore les volumes d’ordures ménagères collectées. En survol, des barres dynamiques présentent l’évolution de la donnée affichée, et permettent de se rendre compte du lien entre différents éléments, la température et la consommation énergétique par exemple. Planant et étonnant ! L’œuvre est signée David Bihanic, designer et chercheur, qui officie aussi en qualité de commissaire de l’exposition.
Armes à feu et gentrification
Au-delà de cet angle dijonnais, le dispositif s’intéresse aussi à des aspects variés du monde, du dérèglement climatique aux données socio-économiques. Une fresque présente, par exemple, le rapport entre le taux de possession d’armes à feu dans différents pays, et le nombre de morts par ces mêmes armes.
Les résultats peuvent étonner, ils ne relèvent pas nécessairement une corrélation étroite entre ces deux données. Autre morceau de choix, un quadriptyque spectaculaire présente quatre grandes métropoles en associant géographie et valeur économique. Où se situent les habitants les plus riches ? Quelle nouvelle structure urbaine émerge si l’on regarde les villes sous l’angle de la richesse des habitants ? Les cartes redessinées de New York, Chicago, Los Angeles et Paris témoignent de la force de la gentrification. Toute la structure urbaine de Paris semble, par exemple, converger vers l’île de la Cité, qui concentre le plus de richesses.
Une autre pièce ne manquera pas d’étonner : Microsoft a développé un algorithme de lecture des émotions sur le visage. Celles-ci sont classées selon qu’elles sont positives ou négatives, puis représentées graphiquement, sous une forme qui rappelle le dessin d’une plume dont la partie haute serait les émotions positives, et la partie basse, les émotions négatives. Passés à la moulinette de l’algorithme, des extraits de discours des six derniers présidents américains déterminent quels sont les ressorts utilisés. Sans grande surprise, Donald Trump s’appuie sur de nombreuses émotions négatives quand Barack Obama puise plus dans la positivité. God bless datas…
> 1, 2, 3… DATA, jusqu’au 24 janvier 2022. Musée de la Vie bourguignonne – 17 rue Sainte-Anne à Dijon.
Tous les jours (9h30-12h30 et 14h-18h) sauf les mardis et jours fériés. Entrée libre.
Visite guidée
Organisée par un regroupement de partenaires, Dijon métropole, Latitude21, l’Esadd et EDF (dans le cadre d’un partenariat avec la Fondation Groupe EDF), 1, 2, 3 DATA assume sa mission de pédagogie des données en assurant la présence permanente de médiateurs, chargés d’expliquer les différentes pièces aux visiteurs. Des étudiants de l’Esadd, mais aussi deux services civils liés à la Métropole commentent et décryptent les œuvres pour les visiteurs. Nécessaire et bénéfique.