« Alain Millot, le gardien du temple »: c’est sous ce titre que nous avions publié son portrait dans l’annuel Dijon Capitale. Un portrait qui ne faisait pas l’impasse sur le dur combat que l’homme menait face à la maladie. Le maire de Dijon en avait d’ailleurs lui-même apprécié la justesse. Quelques heures seulement après sa disparition, le relire prend un sens nouveau. Avec une pensée émue à tous ses proches.
Par Dominique Bruillot
Dijon Capitale, janvier 2015. Il est l’homme tranquille sur lequel François Rebsamen a toujours pu se reposer. Depuis qu’il est à la tête de la Ville et du Grand Dijon, Alain Millot assume son rôle de « gardien du temple » avec sérénité, dans un contexte personnel qui force le respect.
L’homme tranquille fait son chemin, fidèle et fiable, déterminé et discret. Alain Millot ressemble à cela, avec une détermination paisible qui relève de son engagement indéfectible, sans le côté démonstratif de l’affaire. Dans sa première vie active, l’ancien éducateur a été, il est vrai, confronté à l’urgence sociale, loin des lumières de la vie publique.
La politique n’est venue à lui que par accident. Une première fois à Besançon, lorsqu’il devient le voisin de palier puis l’ami de Jean-Louis Fousseret. C’est à la fin des années soixante-dix, bien avant que le socialiste franc-comtois ne s’empare de Besançon.
Puis une deuxième fois, alors qu’il est retourné chez lui, dans sa bonne ville de Dijon, pour intégrer le tribunal. A la demande de François Rebsamen, en 2001, il embarque à bord du navire PS. La victoire est au bout de la campagne. Alain Millot est désormais le fidèle bras droit d’un futur ministre.
Tranquillité publique garantie
L’homme tranquille va notamment s’occuper de la tranquillité de ses concitoyens. Rassurant, précis, il a en charge la coordination, l’administration générale des services ainsi que, cela tombe sous le sens, la tranquillité publique et la médiation. Un exercice d’équilibriste dont il s’accommode bien, qui consiste à renforcer la sécurité sans se défaire d’une fibre sociale solidement ancrée en lui.
Malgré certaines contestations, il distingue ainsi le rôle de la police municipale de celui de la police nationale et s’oppose farouchement à l’armement de la première, assurant qu’« on ne porte pas une arme comme ça, il faut y être préparé, constamment entraîné ». Ce rôle entre courtoisie et fermeté est taillé sur mesure pour lui. Il le double, de 2004 à 2010, d’une vice-présidence du conseil régional auprès de François Patriat, qui lui confie l’emploi et le développement économique.
Encore un nouveau tremplin qui le conduit vers une nouvelle responsabilité, en 2008, lorsqu’il fait son entrée au conseil général, après avoir cette fois-ci exclu du jeu l’immuable Bernard Depierre. Même pas peur des rocs de l’UMP, l’homme tranquille!
Alain Millot est apprécié de la plupart des élus, y compris dans l’opposition, pour son dévouement, sa connaissance des dossiers et sa capacité à traverser les épreuves et les contradictions sans sourciller, avec une douceur apparente teintée de fermeté. Depuis 2014, on ne peut que souligner aussi son courage… à peine six mois après avoir pris la mairie et la présidence du Grand Dijon, en remplacement de François Rebsamen devenu ministre, il annonce publiquement qu’il est atteint d’un cancer.
Voilà qui est dit sans détour, quelques jours seulement après avoir participé aux vendanges citoyennes du domaine de La Cras racheté cette année par le Grand Dijon. Drôle de millésime. Dans son style habituel, offensif mais conciliant, Alain Millot coupe l’herbe sous le pied des spéculateurs de l’info spectacle.
Voilà qui n’empêchera pas non plus l’homme tranquille de se battre sur les deux terrains à la fois.
Patient et apaisant
« Par-delà la brutalité de ce diagnostic, que je prends très au sérieux, et des soins qui en découleront, je veux rassurer les Dijonnaises et les Dijonnais », écrit-il dans un communiqué officiel le 13 octobre 2014.
L’annonce provoque un choc. Pendant ce temps, tranquillement toujours et encore, Alain Millot pousse à son terme le lourd dossier de transformation du Grand Dijon en communauté urbaine. On le voit, fidèle à lui-même, s’intéresser de près aux événements culturels qui animent la ville, aux commémorations des deux guerres, aux grands aménagements du mandat en cours.
A l’heure où cet article se pose sur le papier (ndlr: janvier 2015), François Rebsamen est encore aux affaires, près de François Hollande. Il revient régulièrement à Dijon pour participer aux assemblées dijonnaises, en conseiller municipal averti et bienveillant. « Il est patient, apaisant », a-il écrit à propos de son ami tranquille, dans un SMS adressé à l’attention de plusieurs conseillers assistant à un conseil municipal. Le ministre a bien raison, il faut savoir reconnaître à leur juste valeur les mérites du gardien du temple.
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