Voilà un entretien qui fait du bien. Notre confrère Laurent Gotti, « journaliste et dégustateur en Bourgogne », sur son site All about Burgundy, a interrogé Jacques Dupont à l’occasion de la sortie de son livre Le Vin et Moi. Juste et fin, l’homme du Point pointe, entre autres, les travers de la dégustation moderne et l’élitisme dont fait parfois preuve l’univers bacchusien. Des propos qui se boivent sans soif, dont voici un extrait représentatif. Pour la suite, c’est ici !
« La dégustation ne consiste pas à traquer le défaut mais à déterminer si le plaisir le dépasse » écrivez-vous. Pensez-vous que la notion de plaisir est trop souvent absente des jurys de dégustation ?
Jacques Dupont : Les grands auteurs ont célébré l’ivresse pendant 2 000 ans : il suffit de lire Horace, Virgile ou Baudelaire. Aujourd’hui, le politiquement correct ne nous en donne plus le droit. Ça ne passerait pas du tout. On a ramené hypocritement le plaisir de boire du vin au plaisir de la « dégustation ». Aujourd’hui on met beaucoup de mots sur du vide. On déguste mais tout le côté convivialité qu’apportait une légère ivresse, de partager à table, tel que le concevait Voltaire par exemple, on le gomme. Voltaire disait que quand il recevait d’Alembert, il s’ennuyait sans un peu d’ivresse…
Il y a finalement confusion entre œnologie et dégustation.
Il existe une culture un peu bizarre du vin qui entretient la confusion entre l’œnologie et la dégustation. Les gens disent : « Je prends des cours d’œnologie ! » Non, ils ne prennent pas des cours d’œnologie, ils n’apprennent pas la biochimie. On a enveloppé le plaisir de boire du vin dans un discours pseudo-scientifique. Les œnologues sont des gens au service du vin, et ils le font très bien, mais qui sont aussi des traqueurs de défauts. Comme ils sont très présents dans les dégustations, les jurys, etc., les consommateurs ont tendance à se ranger derrière « l’homme de l’art » et à traquer à leur tour le défaut. Avec mon ami Olivier Bompas (Ndlr : son confrère du Point), nous regoûtons toujours une deuxième fois les vins, après une première dégustation plus analytique, pour voir si l’on a du plaisir à les prendre en bouche.
Enfin, je crois que le vin populaire a disparu de nos sociétés. On est dans le vin élitiste. Quand on dit que beaucoup de jeunes s’intéressent au vin, si on y regarde de près, il s’agit des jeunes de l’élite, des grandes écoles. Ils s’y intéressent parce que le grand-père qui avait une belle cave, dans une belle maison, etc.
> pour lire la suite de l’entretien, rendez-vous sur All about Burgundy.