Aux prémices des Papillons Blancs, il y eut l’enfant et la préoccupation de soulager les parents. Soixante ans plus tard, l’association beaunoise œuvre pour insérer socialement les handicapés mentaux toutes générations confondues. La boucle est bouclée pour ces générations ailées.
Par Michel Giraud
Pour Dijon Beaune Mag #68
C’est l’histoire d’une vie. De ces grands enfants retraités qui, il y a 60 ans, ont été les premiers accueillis aux Papillons Blancs de Baune. La structure a grandi en même temps qu’eux ; une à une les pièces du puzzle ont été imaginées pour soutenir au plus près les enfants, puis les jeunes, puis les adultes, et leurs familles. « Aujourd’hui la boucle est bouclée, sourit Jacques Berthet, le directeur général de la structure beaunoise. On a commencé avec la petite enfance, puis on les a soutenus adolescents, on leur a ensuite donné du travail pour asseoir leur vie d’adulte. Il est de notre devoir de leur offrir une retraite heureuse. »
La mobilisation des parents
L’aventure des Papillons Blancs s’est construite autour de la petite enfance. Pierre Carême, un Chalonnais, fut le premier à s’investir en Bourgogne. Il se démena pour son septième né, Pierre-Dominique, diagnostiqué trisomique. « À Beaune aussi, on recensait à l’époque quelques familles, trois ou quatre, ayant un enfant déficient mental pour lequel elles n’avaient pas de solution », précise Jacques Berthet. Nous sommes en 1955, vingt ans avant les premières grandes lois sur le handicap : « Les parents étaient en grande souffrance, désœuvrés. Les enfants avaient besoin de soutien, d’école. Et voilà comment, en dehors de toute institution, un petit groupe de parents a décidé, avec ses propres deniers, d’embaucher une éducatrice. Ce groupe va rapidement se structurer sous le régime d’une association loi 1901… » Régime qui est encore celui des Papillons Blancs.
Sortir de sa chrysalide
Aujourd’hui, près de 90 enfants sont accueillis aux Papillons Blancs. À lui seul, l’Institut médico-éducatif (IME) en encadre une quarantaine. Sophia, William, Alexandre, Laura, Gillian, Thomas, ont trouvé un terrain propice à leur épanouissement. Les uns construisent des ruches, les autres animent un blog, un journal, jouent de la musique. Peu importe l’activité, chacun sort de sa chrysalide et franchit des obstacles : vaincre ses peurs, devenir autonome, apprendre à vivre avec l’autre, s’amuser, rire, aussi dans l’insouciance de l’enfance et de l’adolescence. Un peu plus loin, il y a Quentin, un jeune garçon autiste. Il ne communique que très peu et bénéficie à ce titre d’un nouveau programme construit autour de tablettes tactiles censées faciliter les échanges. Pour beaucoup de parents, c’est un soulagement que de savoir les enfants entre de si bonnes mains. Représentés au Conseil d’Administration, ils sont en quelque sorte les garants de ce long cheminement.
Innocence et instabilité
L’histoire nous rappelle en tout cas cet attachement aux plus jeunes, qui résonne jusqu’aux prémices de l’aventure. C’est un certain Léonce Malecot, magistrat de son état, qui baptisa ainsi les Papillons Blancs. Pierre Carême le racontait en 1998 dans un entretien à la revue Épanouir : « À Paris, Monsieur Malecot avait créé dès 1950 une association et animait une salle de danse et de musique pour les jeunes en situation de handicap. Il était lui-même père d’un enfant trisomique. Un jour, en assistant à un cours de danse dans la salle des fêtes du XIIIe arrondissement, il eut cette réflexion devant sa femme : “ Regarde notre fille. Elle a la blancheur de l’innocence et l’instabilité du papillon ”. »
Pimpant soixantenaire
2018 sera l’année des 60 ans des Papillons Blancs de Beaune. Une année d’événements, une année de changements. À commencer par l’inauguration mi-janvier d’un nouveau foyer résidence pour des adultes en situation de handicap, implanté à Savigny-lès-Beaune. Une cinquantaine de résidents peuvent y être pris en charge, dans des chambres individuelles, imaginées autour d’espaces communs et de lieux de convivialité.