Avec son salon « Nuits au grand jour » organisé en marge de la vente des vins le week-end prochain, le syndicat des vignerons de Nuits et Premeaux-Prissey dévoile tout le potentiel d’un terroir riche de sens et d’atouts, à l’image de son premier cru Les Saint-Georges. À travers ce grand climat, le président du syndicat, Yvan Dufouleur, veut propulser Nuits dans les étoiles.
Par Michel Giraud pour Dijon-Beaune Mag – Photos : Jonas Jacquel, DR
13 avril 1905. Le syndicat agricole et viticole de Nuits-Saint-Georges voit le jour. À l’époque, quelques propriétaires inspirés conviennent de se réunir pour défendre leurs intérêts dans un contexte sanitaire marqué par le mildiou et le phylloxera. De façon beaucoup plus pragmatique, ce groupement doit aussi permettre de faciliter l’achat en commun de machines et autres équipements. Un siècle plus tard, le syndicat est toujours aux affaires. Il a bravé les épreuves du temps grâce à une concertation intelligente, renforcé notamment par des signes symboliques et à la fois très concrets : la création in situ de la confrérie des Chevaliers du Tastevin en 1934, la naissance de son AOC en 1936, l’émergence de véritables « papes » locaux comme Henri Gouges.
Sentiment d’appartenance
Depuis, les ODG ( Organismes de défense et de gestion, celui de Nuits compte 140 adhérents) ont assumé la gestion des appellations, laissant au syndicat et à ses 45 adhérents – des exploitants installés sur les communes de Nuits et Premeaux-Prissey – le soin de poursuivre leur action militante. Yvan Dufouleur, 54 ans dont 35 de métier, est au premier rang de cette préoccupation. Le dirigeant du domaine Guy & Yvan Dufouleur préside un groupement « porteur de sens, constitué d’un noyau dur d’une vingtaine de domaines animés par ce sentiment d’appartenance ».
Le syndicat porte les gênes de l’innovation. Le président confirme et égraine : « Nous avons été les premiers à vendre la capsule-congé (ndlr, la fameuse capsule à tête de Marianne, attestant le paiement des droits aux douanes) nous-mêmes, nous sommes propriétaires de nos locaux, la Maison des vignerons, que nous avons construite en 1997 (lire encadré ci-contre) ; nous co-organisons de la Vente des Hospices ; nous avons coordonné la construction de la plateforme de lavage… Cette vitalité nous protège. Ici, le comité de Saint-Vincent, ce n’est pas seulement un banquet le 22 janvier pour boire des coups (sourires). L’entraide existe vraiment sur le terrain : un gars malade ou dans la panade, et les autres sont immédiatement au travail ! »
L’esprit des anciens
Les temps ont changé, comme partout ailleurs, et le feu de l’unité est à raviver sans cesse. En premier lieu parce que la transmission à la nouvelle génération ne doit pas galvauder l’œuvre des anciens. Yvan Dufouleur est formel : « L’engagement parfois aléatoire des jeunes a de quoi poser question, même si je ne veux pas jouer aux vieux censeurs. Il faut tenir bon. Les anciens comme Henri Gouges se sont battus pour nous et pour la Bourgogne entière, il ne faut pas l’oublier et leur rendre hommage en portant le syndicat. Sans eux, les vins de Nuits-Saint-Georges n’en seraient pas là. »
Voilà un sage précepte pour unir tout le monde à la cause d’un vignoble mondialement connu – « peut-être même plus que Beaune, dans certaines régions du monde », glisse Yvan – qui représente plus de 300 hectares, dont 98 % en rouge. Ce seigneur du pinot noir abrite 41 premiers crus (dont les fameux Saint-Georges, Pruliers, Vaucrains, Cailles…) et peu de localités peuvent se prévaloir d’une telle régularité. « On souffre d’un manque général de connaissance et donc de reconnaissance », constate pourtant le président du syndicat, qui s’interroge sur cette « incapacité à franchir un palier auprès des acheteurs professionnels. On le voit bien dans les ventes au négoce par exemple. Morey-Saint-Denis nous a depuis rattrapé. »
Le serpent de mer
Yvan Dufouleur n’entend pas comparer qui a la plus grosse (d’étiquette s’entend) ni jalouser ses voisins de rang. Il estime cependant que « l’absence d’un grand cru dessert l’appellation, dans un contexte de plus en plus siphonné par les buveurs d’étiquettes. À ce jeu-là, nous peinons à passer la vitesse supérieure, quand bien même notre niveau général est de très belle facture et les retours de dégustations sont unanimement positifs ». Le coup de projecteur pourrait venir du climat Les Saint-Georges, dont la passionnante histoire est intimement liée au classement de grand cru. Le dossier de ce premier cru est un serpent de mer, sensible sur les bords, « dont le statu quo pose la question de savoir si nous allons y arriver un jour ». L’attente est aussi grande que les promesses nuitonnes.
Nuits au grand jour, pour en savoir plus… http://www.nuitsaugrandjour.com
La Maison des Vignerons prépare sa mue
Au 4 de la rue Charles-Arnoult, en plein cœur de ville, le syndicat viticole de Nuits-Saint-Georges et Premeaux-Prissey installait en 1997 la Maison des vignerons. À l’origine, ce devait être un lieu de réunion et de bureaux. Puis l’histoire à pris de l’ampleur, et aujourd’hui Yvan Dufouleur est son équipe sont bien décidés à changer de braquet : « Des travaux sont prévus, nous sommes en plein dans les plans, et les premiers coups de pioche devraient être donnés dans l’année. Nous allons agrandir le magasin, en faire un lieu attrayant, porteur de nos valeurs. Aujourd’hui, la Maison est un allié de poids pour nos adhérents : ceux qui n’ont pas la structure ou le temps pour vendre directement au domaine y trouvent un lieu de dépôt. Elle doit aussi être une vitrine pour les touristes, un support de confiance pour notre clientèle. Beaucoup de Côte-d’Oriens ne veulent que deux ou trois bouteilles pour déguster, ils se disent qu’ils ne vont pas aller déranger les vignerons pour cela. Ici, ils trouveront forcement leur bonheur. »
Maison des Vignerons de Nuits-Saint-Georges
4 rue Charles Arnoult à Nuits-Saint-Georges 03.80.62.18.77 – www.maisondesvignerons.fr