Codirigeante de la maison du même nom, Claire Briottet est la première femme élue à la tête du syndicat. Elle succède à François Battault. Fruit de son engagement premier : la défense des intérêts de la filière, sur fond de concurrence internationale pas toujours loyale.
Le Syndicat des Fabricants du Cassis de Dijon rassemble les maisons dijonnaises Gabriel Boudier, Lejay-Lagoute, L’Héritier-Guyot et Edmond Briottet. Il pèse environ 70 millions d’euros dont 28 à l’export. Autant dire du solide dans le monde des liquides. Trois sont labellisées Entreprise du Patrimoine Vivant (EPV), ce qui situe leur niveau d’ancienneté à Dijon et leur crédibilité. C’est la première fois dans l’histoire de la filière qu’une femme est élue à sa tête, depuis sa création du syndicat en 1945.
Depuis 2014, Claire Briottet dirige avec son frère Vincent l’entreprise familiale née en 1836, reprise dans les années 1900 par leur aïeul Edmond. Issue de la grande distribution, puis entrée au bercail en 2010 auprès du patriarche Gérard, elle assume aujourd’hui les volets marketing, finances et développement commercial.
Les enjeux ne sont pas neutres en ce qui concerne la défense des intérêts communs des liquoriste dijonnais. C’est un sujet historiquement sensible. « Ce mandat, qui m’honore, sera placé sous le double signe de la défense et de la promotion de la filière », affirme d’entrée la présidente, déjà engagée de longue date dans le syndicat. « Il faudra plus que jamais, dans un contexte international particulièrement agressif, nous mobiliser pour défendre nos valeurs, notre image et la qualité de nos produits Made in Dijon dans le monde entier. C’est un défi majeur pour la filière, que nous sommes collectivement prêts à relever ; et qui nous a d’ailleurs beaucoup occupé durant le confinement. »
Dijon made in China ?
Sur le haut de la pile des dossiers, la défense du lieu de naissance. Le syndicat réaffirme sa volonté défendre la marque « Dijon », l’indication géographique (IG) « Cassis de Dijon » et « la prévenir contre une concurrence externe bien réelle ». Dernier exemple frappant : en février, l’Inao a alerté le syndicat des cassissiers sur un dépôt de la marque « Dijon » en cours, en français et en chinois, dans la classe vins et spiritueux, par une entreprise chinoise spécialisée dans ce secteur. Cette démarche menace ainsi directement l’IG « Cassis de Dijon » et questionne sur la protection et l’usage commercial de la capitale régionale.
Le syndicat s’est donc pourvu en justice à cette fin, embarquant avec lui élus et autorités compétentes pour empêcher ce dépôt. François Rebsamen himself a saisi le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation de ce dossier, sur lequel le syndicat assure une vigilance de tous les instants. Ce dernier envisage de formuler une demande pour que le cassis dijonnais puisse être inscrit en tant qu’IG protégée en Chine. La crème de la crème, c’est chez les ducs et pas ailleurs !
Claire Briottet et ses collègues ont été aussi actifs concernant le Japon, où leur produit est particulièrement présent : on parle de la première liqueur internationale vendue dans le pays (2,5 millions de bouteilles Cassis de Dijon/an sur les 8,5 millions produites au global, une paille !). Une première étape a été franchie en avril dernier où, sur initiative de l’Inao, et après sollicitation du syndicat, l’IG a été proposée par la Commission européenne pour être inscrite et protégée au sein de la liste de l’accord de libre-échange entre l’UE et le Japon. Cette demande de reconnaissance doit encore être acceptée par le pays concerné.
Alexis Cappellaro