Avec son équipe et son épouse Nathalie, Joël Césari n’a pas chômé cet été à La Chaumière, son bel hôtel-restaurant étoilé. Derrière ses lunettes excentriques, le chef dolois guette cependant l’arrivée de la saison froide. Interview dans le cadre de l’opération « Je donne ma langue au Chat ».
Comment s’est passé l’été à Dole ?
Plutôt très bien nous concernant, on espère que ça continue dans ce contexte aussi incertain. Nous avons repris le 12 juin et enregistré le même volume d’affaires que l’an dernier à la même période, ce qui est bon signe. Il a fait beau et nous avions un avantage structurel avec notre terrasse, qui permettait la distanciation.
En quoi l’offre de La Chaumière a-t-elle changé ?
Comme beaucoup, nous avons dû renouveler notre proposition, avec une cuisine bistronomique de qualité du mardi au vendredi midi et plus gastronomique du vendredi soir au samedi soir. Cela me titillait depuis un moment. Notre ticket moyen pour le bistro du midi a été une vraie bonne surprise, et nous avons doublé la vente de vin au mois de septembre comparé à l’année précédente.
Vous aussi, avez proposé des plats à emporter…
Oui, trois week-ends avant le déconfinement. L’offre à emporter a surtout permis au personnel de revenir, ce qui était loin d’être évident. On a travaillé différemment, en faisant quasiment un autre métier, assez éloigné de nos réalités du service quotidien.
La Chaumière fait également hôtel. Pour quelles réalités ?
Là aussi, nous étions complets jusqu’à fin septembre. La fin d’année ne sera pas comparable : tout ce qui nous fait vivre habituellement – les séminaires, les entreprises locales et de la région, les grands rassemblements, les mariages – se retrouve chamboulé. Pour en parler avec des chefs d’entreprise locaux, la confiance n’est pas forcément là et côté réceptif, ce n’est même pas à envisager.
Notre approche du circuit local change. Et vous ?
Ce n’est pas nouveau pour un chef. Chaque début d’année, je fais du sourcing auprès de mes producteurs, j’y suis très attaché mais ne suis pas obsédé par le « tout local » non plus. Ma féra du lac, que je sers en ce moment avec giroles de pays, pickles d’oignons rouges et lie de vin bisquée, tout ça, je sais la qualité et la provenance. Il a aussi fallu faire des choix cet été : pendant quinze jours, je n’ai pas pu avoir de volaille de Bresse. Il a fait tellement chaud, elles étaient toutes maigres, j’ai préféré y renoncer. Là, les premières viennent d’arriver mais ce sont des poulettes (jeunes poules), pas des poulardes (poules plus dodues, engraissées et élevées pour leur viande).
Et le Chat Perché, dans tout ça ?
Cette annulation, après un an de travail, c’est pas de pot. Mais je ne vois pas comment nous aurions pu faire autrement. L’essentiel reste tous ces partenaires que l’événement a su fédérer sur le long terme. Ce n’était pas évident, je dis « chapeau ». Après cette pause, chacun reviendra avec des idées et des intentions nouvelles. Cette période a fait réfléchir tout le monde.