L’intendant général de la confrérie des Chevaliers du Tastevin est à la croisée des chemins de la Saint-Vincent de Puligny et de la Vente des vins des Hospices de Nuits, qui auront lieu ce week-end. Arnaud Orsel est donc bien placé pour assurer que cette coïncidence des dates, intéressante à plein d’égards, ne se reproduira pas deux fois.
Arnaud Orsel est l’intendant général de la confrérie des Chevaliers du Tastevin. Il est doublement concerné par la Vente des Hospices de Nuits et la Saint-Vincent tournante. © Bénédicte Manière
Vous en pensez-quoi, de cette concentration de trois événements vineux (Saint-Vincent de Puligny, Ventes des Hospices de Nuits et Grands Jours de Bourgogne) les 19 et 20 mars ?
Ne revenons pas sur les raisons, considérons que c’est un grand plat avec plein d’ingrédients qui annoncent qu’on va passer un grand week-end exceptionnel. Il n’y en aura pas d’autres comme celui-ci. C’est le moment où jamais d’en profiter.
Ah bon, les choses reprendront donc leur place à l’avenir ?
On ne refera plus la Saint-Vincent en mars. D’ailleurs, on ne célèbre pas un 14 juillet le 8 mai ! Cette opportunité accidentelle est certes très intéressante, elle permet d’inventer en quelque sorte les Trois Glorieuses du printemps. Mais à moins que le pape crée une bulle spécifique, la Saint-Vincent retrouvera son calendrier traditionnel, fin janvier. En janvier, on aime l’effort de se lever à 5h, de mettre des fleurs dans une vigne dormante, au moment où on tue le cochon. Tout cela est plein de poésie, n’est-ce pas ?
Dans le contexte d’une Bourgogne des vins en pleine envolée spéculative, qu’avons-nous réellement gardé de cette tradition mutualiste et solidaire ?
Rappelez-moi une seule dégustation qui permet d’avoir six verres de vin de Bourgogne dont des premiers crus pour 25 euros ! La Saint-Vincent tournante, c’est un état d’esprit, qui fait hommage au partage et à la solidarité. Comme en 2015, lorsqu’on a réalisé une cuvée de Clos de Vougeot pour les moines de Cîteaux. Pour assembler et rassembler, dans un esprit non lucratif.
Puligny-Corpeau-Blagny… À travers cette réunification, on a donc trouvé la bonne formule ?
Cette Saint-Vincent tripartie réunit une appellation méconnue et pleine de particularités, une mini Bourgogne en soi (Blagny), avec Corpeau-Puligny, deux mairies tenues par des femmes et totalement complémentaires du point de vue des appellations. Ce que Puligny n’a pas, on le retrouve à Corpeau et inversement.
Et pour Nuits, alors, comment ça se passe ?
La vente des vins des Hospices de Nuits est un pur joyau, avec des vins hyper ciselés. On y fait moins de battage qu’à Beaune. Pourtant, le prix à la pièce est à peu près équivalent. L’œuvre de charité se poursuit (ndlr, la confrérie achète régulièrement les mêmes cuvées, lire ici). La mobilisation des vignerons pour leur appellation est totale. On garde à Nuits, peut-être plus qu’ailleurs, cet aspect vigneron qui renvoie à l’esprit de solidarité bourguignonne.
Donc tout est possible !
Nous avons fait une réunion entre Nuits et Puligny au lendemain de la validation des dates communes aux deux événements. En signe de nos amitiés réunies, j’ai alors ouvert un puligny premier cru vinifié par un vigneron de Nuits-Saint-Georges. Ce week-end sera aussi le premier événement grand public du château du Clos de Vougeot depuis longtemps, symbole de reprise. Mais le néologisme « Pulignuits », dont vous avez fait si habilement la « une » de DBM, ne marchera qu’une fois.