Elle coche les cases des grands vins de terroir et le consommateur peut y accéder sans se faire vendanger le portefeuille. L’appellation régionale Bourgogne Côte d’Or a de quoi retenir (un peu) le grand dérapage des prix en Bourgogne selon notre chroniqueur Jacky Rigaux.
Jacky Rigaux, le 29 septembre dernier, lors de la seconde dégustation qui labellise les meilleurs Bourgogne Côte-d’Or à l’initiative de Bourgogne Magazine. © Antoine Martel
Par Jacky Rigaux
Nouvelle venue dans le paysage bourguignon en 2017, l’appellation Bourgogne Côte d’Or est bien décidée à ne pas jouer les seconds rôles dans un monde du vin devenu fou avec les prix stratosphériques de ses grands crus. Deux labellisations organisées par Bourgogne Magazine (la dernière en septembre dernier), rassemblant une cinquantaine d’échantillons chacune, ont mis en évidence la grande qualité de ces vins.
Le rappeler ne fait jamais de mal : avec la création des appellations d’origine contrôlée (AOC) dans les années 1930, seule la Bourgogne a organisé sa viticulture autour du primat du terroir, avec une hiérarchie de ses parcelles, (les fameux « climats » !) en quatre classes : grands crus, premiers crus, villages et régionales. C’est ainsi que la Bourgogne pouvait faire reconnaître par l’Unesco, en 2015, que « les climats du vignoble de Bourgogne sont le berceau et l’archétype de la viticulture de terroir dans le monde ».
La Champagne a sa marque, le Bordelais a ses châteaux
La Champagne a opté pour la marque, le Bordelais pour le château et les autres vignobles pour une délimitation géographique sans hiérarchie en son sein. Si la Champagne a obtenu également des grands crus, c’est tout le village qui est concerné. Comme si tout le vignoble de Gevrey-Chambertin était en grand cru ! En Bordelais, le château peut agrandir son parcellaire, à condition de rester dans son périmètre communal. Ainsi, Château Latour a largement agrandi sa superficie initiale reconnue en 1855 en annexant Château La Bécasse.
Cependant, avec l’appellation régionale Bourgogne, considérée comme l’entrée de gamme, les autorités de l’Institut national des appellations d’origine (Inao) ont accepté tous les assemblages régionaux. Ainsi peut-on trouver des bouteilles affichant fièrement « Bourgogne » qui contiennent des jus pouvant provenir de l’Yonne, de la Côte-d’Or et de la Saône-et-Loire.
Un mouvement initié dans les années 1980
Dès les années 1980, des vignerons de la Côte de Beaune et de la Côte de Nuits, sous l’impulsion de Patrick Javillier et de Philippe Charlopin, ont initié le mouvement de reconnaissance d’une identité dès l’appellation régionale. Les Hautes-Côtes de Beaune et de Nuits, comme le Bourgogne Côte-Chalonnaise, également appellations régionales, avaient ouvert la voie. Bourgogne Côte d’Or s’inscrit dans ce prolongement.
Identité « Côte d’Or » (sans tiret, contrairement à l’entité départementale) affirmée donc, avec même la possibilité de mentionner un climat si le vin en est exclusivement issu, comme le Bourgogne Côte d’Or « Clos Frantin » ou le Bourgogne Côte d’Or « Les Bons Bâtons ». Entrée de gamme ne signifie pas petit terroir. En effet, tous les vins sont issus de vrais terroirs. La plupart naissent dans le piémont, là où les colluvions argilo-calcaires sont descendues des hauteurs par ruissellement. Si certains semblent être déjà dans la plaine, c’est tout simplement parce qu’ils se situent dans le prolongement d’une combe qui a charrié très loin de bonnes colluvions.
D’autres vins estampillés Bourgogne Côte d’Or sont issus des hauts de coteaux, là où la terre se raréfie, mais où la vigne peut encore s’accrocher. Dans le verre, on a donc bien toujours un message tactile, gustatif et olfactif de lieu ! Comme l’écrit Aubert de Villaine, « les appellations régionales annoncent les charmes plus complexes qu’offriront, après vieillissement, leurs supérieurs hiérarchiques ». Accessibles plus rapidement, avec déjà du caractère, et promis cependant à une bonne garde dans les plus grands millésimes, tels sont les Bourgogne Côte d’Or.