S’il ne représente que 4% de la production viticole du Jura, le vin jaune n’en demeure pas moins un emblème de la région. Vieillissement, typicités géologiques palette aromatique unique… Jacky Rigaux, spécialiste des vins de terroir, nous explique ce qui fait la renommée de ce vin de voile.
Par Jacky Rigaux, spécialiste des vins de terroir
Le cépage savagnin, qui colonisait encore plus de 1 000 hectares à la fin du XIXe siècle, n’en couvre plus qu’environ 200 de nos jours. S’il vient d’Europe centrale, c’est sur le terroir jurassien qu’il s’impose souverainement. En particulier pour le vin jaune, après avoir séjourné 6 ans et 3 mois dans un fût de 228 litres, où un voile de levures se déploie en surface. Les feuilles du savagnin sont petites, peu échancrées et rondes. Ses petites grappes sont constituées de grumes sphériques qui mûrissent tardivement. Il peut être vendangé jusqu’aux premiers froids.
Les conditions climatiques, de type semi-continental, avec des hivers froids et des étés chauds, convient bien au savagnin, qui a trouvé là son expression ultime en vin jaune sur des marnes grises ou gris bleuté du Lias, recouvertes d’abondants éboulis qui lui permettent de bien s’accrocher aux coteaux. Les raisins accèdent harmonieusement à la maturité physiologique de leur peau et de leurs pépins pour enfanter un des plus grands vins blancs de France.
Le secret de sa complexité et de la singularité inimitable de son goût se niche dans une spécificité de cet écosystème jurassien du Revermont où les levures anaérobies (Saccharomyces oviformis) provoquent une oxydation très lente qui confère à ce vin son incomparable « goût de jaune ». Robe jaune or plus ou moins ambrée au gré de l’évolution, nez de noix et de curry, texture dense, délicate amertume en fin de bouche sur une très longue persistance, tel est le vin qui est mis en bouteille dans le « clavelin », bouteille originale aux larges épaules d’une contenance de 62 cl. Son volume hors normes correspond au volume proportionnel de vin non évaporé au travers du bois après les six années de vieillissement (62 %) !