Il faut aider les maires ruraux dans la mise en œuvre de leurs travaux. Vincent Martin milite pour un accompagnement des décisions dans les communes. Le président de la FRTP de Bourgogne-Franche-Comté n’y voit pas seulement une voie pour faire tourner les entreprises qu’il représente, mais une façon de faire tourner la France. Tout simplement.
En France, le secteur des Travaux publics emploie près de 300 000 salariés pour 100 milliards d’euros de chiffre d’affaires, répartis à parts égales entre les marchés national et international. Les poids lourds du secteur sont principalement basés en Île-de-France, qui concentre plus de 20 % de l’activité. Avec 1,8 milliard de CA, 1 100 entreprises pour dix fois plus de salariés, la Bourgogne-Franche-Comté est le petit poucet des régions. Son « jardin » est pourtant bien plus vaste à entretenir que celui de sa grande sœur de la capitale. Paris n’est pas la France, rien de neuf à l’horizon, mais la ruralité fait toujours et encore les frais de cette disparité.
Pas un problème d’argent
Vincent Martin connaît bien le dossier. Président de la FRTP BFC, le dirigeant de Roger Martin, premier groupe familial de la région, est aussi vice-président de la fédération au niveau national. Soit une bonne façon de ne pas être déconnecté de la prise de décision au sommet. Le procès fait au centralisme jacobin est toujours d’actualité. À travers lui, on pourrait même identifier des marges de manœuvres intéressantes pour notre pays.
« La tenue du congrès national des maires ruraux, fin septembre près de Dijon, est très importante pour nous, se réjouit Vincent Martin. Il faut en profiter pour redonner du pouvoir et de l’importance aux élus de la ruralité ». Les élections européennes puis législatives de cette année ont en effet apporté l’éclatante et inquiétante démonstration de la rupture territoriale. La campagne se sent oubliée, humiliée parfois.
Pourtant, « c’est d’elle que partent les initiatives, les infrastructures routières et informatiques, avec la nécessité de relier les zones rurales les unes aux autres ». Il est toujours bon de marteler ce genre d’évidence.
« Les maires des petites communes comptent peu dans la stratosphère de la politique nationale, ils sont bénévoles la plupart du temps et délaissé. » Vincent Martin appuie là où ça fait mal. D’autant qu’il ne s’agit pas d’un problème d’argent, « les communes françaises ont encore des moyens et il y a des budgets disponibles en soutien ». Sur le toit de la pyramide décisionnelle, la FNTP sensibilise l’État sur la question des investissements locaux. À l’échelle régionale, le syndicat s’intéresse de près à la mobilisation des élus.
Accompagner les communes
Au cœur de la cible, la fameuse DETR et le Fonds vert. La dotation d’équipement des territoires ruraux, comme le souligne son cahier des charges, « contribue à la réalisation par la collectivité locale d’investissements, ainsi que de projets dans le domaine économique, social, environnemental et touristique, ou favorisant le développement des services au public en milieu rural ». Un outil déterminant, tout comme le Fonds vert qui accompagne la transition énergétique. Mais le hic est ailleurs. « Il faut que les maires ruraux fassent preuve d’initiative et n’hésitent pas à demander de l’aide pour franchir le pas ».
Les enveloppes sont encore disponibles. La France des clochers, de ces villages qui sont gérés en bon père de famille, n’est pas endettée. « Cela pêche souvent par manque de compétences des organismes et des bureaux d’études privés qui devraient être là pour les conseiller, déplore Vincent Martin, même si, heureusement, certains départements comme la Côte-d’Or ont pris les devants. Dans le 21, la mission MiCA propose aux collectivités locales un conseil pour les soutenir dans des problématiques administratives et juridiques. »
La complexité de la réglementation effraie plus d’un maire. « Or pas de dotation se résume à pas de travaux. Si vous posez la question du pourquoi et du comment au préfet Franck Robine, qui est en charge des arbitrages de l’utilisation de la DETR, il vous répondra qu’il n’a pas suffisamment de projet en face. » Les explications sont multiples. Plus de 60 % de maires sont nouveaux depuis les dernières élections. Face à l’insupportable complexité qui plombe leur mission, aux responsabilités qui se multiplient, ils se sentent seuls et désemparés. La peur de l’inconnu, l’absence de compétences dans leur environnement immédiat, une certaine frilosité conjoncturelle sont des freins que l’on peut comprendre. Certains osent, les plus expérimentés le plus souvent, les autres moins.
« Il faut les aider. L’intercommunalité, sous-exploitée dans ce domaine, est une piste de mutualisation des moyens et des réflexions, au même titre que le Département. » Le président de la fédération régionale y voit un bon moyen de permettre au maire isolé de ne pas se sentir abandonné dans sa jungle administrative, de le motiver pour partir en quête de financements et de bons montages, de dialoguer avec les autres acteurs. Selon lui, les réseaux des « comcom » et le découpage bonapartiste et départemental de la France sont les bons outils de soutien de notre si précieux socle communal. Bien plus que certains autres étages du millefeuille territorial qui est le nôtre désormais. Mais ceci est déjà une autre histoire.