Serge Wrobleski a une culture en béton de la pierre reconstituée. Son entreprise en fabrique depuis plus de 25 ans. Mais Alentour a aussi pris le virage du chanvre, porté avec conviction par sa fille Sophie. Deux générations et deux façons de faire cohabitent heureusement à Lux.
Serge Wrobleski est intarissable. Vous voulez tout savoir de la pierre reconstituée ou pierre moulée ? Lisez sa prose sur son site, elle en retrace l’histoire avec passion. Alentour sublime les façades, les terrasses, les balcons, les piscines et toute forme de mobilier urbain. Grâce à cette pierre concassée qui reprend forme dans un moule (lui-même créé sur la base d’une pierre taillée), l’entreprise est une embellisseuse des extérieurs, privatifs et collectifs. Elle est une partenaire fidèle de l’Association des Maires Ruraux de France (AMRF), qui lui offre un terrain d’expression très large.
Le retour du chanvre
La pierre redevenue pierre est donc un art à part entière. Une quinzaine de spécialistes y travaillent chaque jour dans les ateliers de Lux, dans la plaine de la Tille. « Quand nous créons des modèles de style plutôt contemporain, nous avons tendance à utiliser le terme « béton décoratif » pour simplement distinguer nos produits du béton brut sans finition », explique Serge Wrobleski, qui ne voit « rien de péjoratif dans cette appellation car le béton est un assemblage de matériaux de nature généralement minérale ».
Il y a beaucoup à dire et à écrire sur cette pierre dite artificielle. Elle a même contribué à la construction de certaines pyramides d’Égypte, sous le nom de « béton géopolymère ». Un art qui « s’est ensuite perdu » avant d’être « redécouvert par les Romains ». Des siècles plus tard, on s’émerveille toujours de la coupole du Panthéon, la plus grande du monde en béton non armé, avec un peu plus de 43 mètres de diamètre à l’intérieur.
Chez Alentour, on aime ainsi marier la création et l’histoire. Comme l’illustre un projet d’aménagement d’une clinique privée de Troyes, avec des constructions aux allures antiques. Ou encore lorsqu’il s’agit de se pencher sur le cas d’une cave de collectionneur pouvant accueillir jusqu’à 10 000 bouteilles. Le chef d’entreprise est inépuisable lorsqu’il décrit le relief et la texture d’un « béton imprimé, estampé, matricé, désactivé, bouchardé, sablé, balayé, coloré, ciré, sérigraphé ou photogravé avec des jeux d’ombrage » !
Mais le monde change et Alentour épouse naturellement les évolutions du marché. Le chanvre est une plante domestiquée par l’homme dès le Néolithique et probablement en Asie. Ses fibres ont habillé les Chinois d’une époque très lointaine. Elles ont permis à Gutenberg d’inventer l’imprimerie. Elles ont fait plus récemment les uniformes de nos soldats des deux guerres mondiales, pour capituler finalement face à l’invasion de la fibre synthétique. Les voilà de retour dans le domaine de l’isolation. Désormais, on fabrique des murs et des dalles isolants en chanvre à bâtir, un mélange de chaux et de chènevotte (paille de chanvre). Une révolution en marche, avec ce matériau 100 % naturel qui « permet une bonne respiration des murs, une très bonne « perspirance » ou capacité à régler la vapeur d’eau ».
Sensation de confort
De la pierre au chanvre, le pas a été allègrement franchi par Alentour. Sophie Wrobleski, chef de projet de Maison Chanvre, ne cache pas sa fierté de participer à cette renaissance. De son apogée en 1840 à 1939, la surface de chanvre exploitée en France est passée de 176 000 hectares à seulement 3 400. Avec ce retour en grâce, elle est revenue à 22 000 hectares (2022), faisant de notre pays le leader européen. Mais pourquoi un tel engouement ?
D’abord parce que rien ne se perd et tout se transforme dans le chanvre, aurait dit Lavoisier. Évacuons un malentendu, sa fleur plafonne à 0,3 % de THC. Pas de quoi s’envoler. Sa graine alimente les animaux et sa poussière finit majoritairement en compost. Une bonne partie de la fameuse chènevotte (28 %) devient du granulat pour le chanvre à bâtir. Dans les mêmes proportions, la fibre participe directement à l’isolation des bâtiments.
« Le chanvre apporte une sensation de confort et de bien-être, il atténue les effets du froid et du chaud », soulignent les Wrobleski. Ces derniers ont fait de cette mutation le pari de l’économie circulaire. Le remarquable Trianon d’Arcelot et l’école maternelle de Castelsarrasin (Tarn-et-Garonne) illustrent déjà bien ce point de rencontre entre les aspirations écologiques du monde de la construction et la quête de proximité.
Avec la COVATI (Communauté de communes des Vallées de la Tille et de l’Ignon), Alentour a développé des champs test de chanvre, créant les conditions d’une nouvelle ressource. Esirem et Agrosup Dijon sont directement impliqués en amont de cette production, dont la promotion est assurée en aval par l’AMR, bien évidemment très intéressée par les perspectives du projet.
Quatre années de recherche et développement ont permis à Alentour « d’obtenir ce chanvre à bâtir qui agglomère la chènevotte par un liant mélangeant la chaux aérienne, le plâtre et le métakaolin ». Le chanvre fait maintenant de nouveau partie de notre quotidien.