Le 28 novembre, salle Devosges, le trompettiste dijonnais Thierry Caens refermera une partition de 40 ans à enseigner au Conservatoire de Dijon par un grand concert entouré de nombreux amis. Le cuivre ne le quittera pas. Le néo-retraité ne manque pas d’air.
Dijonnais millésime 58, Thierry Caens est d’abord le fils de son père. Marcel Caens (1919-2006) fut lui-même professeur au Conservatoire de Dijon de 1954 à 1985, enseignant à son fils l’art de la trompette en parallèle d’autres « merveilleux professeurs d’éducation musicale », les Pierre Brille, René Cuenot, Claude Clacquesin, Roger Desoomer, France Jenicot…
Habité par le tropisme familial de la musique et des arts (en témoigne son saxophoniste de frère Jean-Pierre), le jeune Thierry fut l’assistant du paternel après être fraîchement sorti du CNSM de Paris dans la classe du grand Maurice André. « J’appris ensuite le métier d’orchestre à Lyon de 1976 à 1981, puis à l’Opéra de Paris jusqu’en 1985 », développe celui qui deviendra professeur quarante années durant, savourant discrètement « la réussite de nombreux élèves qui ont pu embrasser des carrières professionnelles de haut niveau ».
La Bourgogne et le monde
Soliste recherché, Thierry Caens a joué dans les plus grandes salles. Le Victoria Hall de Genève, le Bunka Kaikan de Tokyo, le Palau de la Musica de Barcelone, les États-Unis, la Chine, l’Italie… Cet esprit libre et curieux ne cessera de voyager entre la Bourgogne et le monde, arpentant avec la gourmandise qui le caractérise les univers du jazz, de la world music, du théâtre, du cinéma.
Trompette solo de plus de 50 bande-originales dont celle du célèbre Cyrano de Bergerac de Rappeneau, Thierry Caens garde dans l’armoire de son cœur plus de 30 disques, dont le dernier en date rend hommage à Cyrano et aux grandes bandes originales du cinéma français.
Le GECCD et Musique au Chambertin
Localement, cette figure de la vie dijonnaise signera de belles « créations originales » comme le Grand Ensemble de Cuivres du Conservatoire de Dijon (GECCD) qui rythmera les grands événements populaires et proposera des cours aux jeunes des quartiers difficiles. Thierry Caens, c’est inévitablement le festival Musique au Chambertin, concept précurseur basé sur l’exaltation de tous les sens, entre grands flacons et grandes partitions, fondé en 1987 avec un adage immuable : « La musique est au Chambertin ce que le coq est au vin. »
Gourmet revendiqué, Thierry Caens garde la transmission et le partage au centre de son assiette. « Je compare souvent ma vie à un grand banquet pour déguster et découvrir les mille et une saveurs proposées. Je vis ma vie d’artiste avec curiosité et appétit, toujours dans l’espoir de le partager dans la joie, avec le plus grand nombre », précise joliment l’artiste, qui a prévu de confier tout son fonds de partitions au CRR.
Un geste hautement symbolique, « le fruit de plusieurs décennies de recherches et d’achat de partitions, plusieurs centaines de titres, de raretés, d’ouvrages de références, avec celles collectées par mon père (…) Une mine dont je veux faire profiter les générations futures ».
Les amis d’une vie
Le concert du jeudi 28 novembre, salle Devosges à Dijon, n’aura donc pas la même résonance que les milliers d’autres. Il porte le souffle épique d’une aventure longue de 40 ans, un adieu au Conservatoire qui l’a vu grandir et qu’il a contribué à faire évoluer.
Evidemment, tous les amis seront là, signe que le trompettiste a toujours su s’entourer. Les fans de la première heure, les fidèles compagnons d’aventure, les élèves reconnaissants, les directeurs du Conservatoire, les artistes avec qui il a tant partagé la partition…
Le grand tromboniste Michel Becquet avec Thierry aura passé quatre ans à l’Opéra de Paris, le pianiste argentin et as du tango Gustavo Beytelmann, son frère Jean-Pierre au saxo, le contrebassiste « maître en jazz » Patrice Caratini, la violoniste Sara Chenal, le fidèle percussionniste Didier Ferrière, dont la fille Adélaïde a repris Musique au Chambertin, et tant d’autres.
« Sont réunis tous ceux que j’aime et admire. Je les remercie d’avoir accepté de m’accompagner ce jour si symbolique. Il achève 40 ans d’enseignement, mais pas mon activité de trompettiste », promet Thierry Caens. L’as du cuivre a encore du souffle, qu’on se le dise !
Jeudi 28 novembre à 20h, salle Devosge. Tarifs : 7 et 13 €. Réservations : [email protected]
Les 10 compositeurs de sa vie
Jean-Sébastien Bach. Le « patron », génie absolu, pour sa profondeur et son inspiration infinie.
Jean-Philippe Rameau. Compositeur exceptionnel et méconnu, y compris dans sa ville (Dijon), il est unique, si original, il mérite une réhabilitation.
Joseph Haydn. Grand talent, prolifique, il est le premier à écrire un grand concerto pour la trompette. Il a été forcément vécu dans l’ombre du génie Mozart…
Richard Strauss. Pour moi le plus grand symphoniste, un univers harmonique et mélodique incomparable.
Claude Debussy et Maurice Ravel. Ils ont révolutionné la composition. Ils ont produit des œuvres majeures du répertoire sans jamais être didactiques.
Igor Sravinsky. Celui qui marqua son siècle par sa créativité en faisant exploser tous les dogmes
Michel Legrand. Un talent protéiforme, mélodiste incomparable et prolifique, depuis ma plus tendre enfance, il illumina ma vie.
Astor Piazzolla. Ce rénovateur du Tango Argentin me fit entrer dans le monde infini des folklores, ce fut un choc qui orienta ma vie musicale.
Michel Colombier. Ce compositeur-arrangeur méconnu fut mon ami et « mentor ». Son talent, dans tous les styles musicaux, et dans tous les genres, a contribué à façonner mon parcours et mon écriture musicale.