Bien réussi dans l’esprit, totalement savouré par une dizaine de milliers de festivaliers, l’Œno Music Festival devra assurer son avenir. Dijon veut conduire la gastronomie à son zénith et son Zénith lui donne désormais toutes les bonnes raisons de s’offrir un événement qui assure un bel accord entre rythmes et vins.
Par Dominique Bruillot
© Photos : Clément Bonvalot
Il fallait être un peu fou pour imaginer ce genre de projets, mais après tout, la musique n’est-elle pas le véhicule de la liberté? En mariant les rythmes binaires avec le vin, l’Œno Music Festival a déjà posé les bases d’une vision originale de ce langage commun qui peut unir les mélomanes et les œnophiles (voir, à ce sujet notre article publié dans le Huffington Post).
Le rock et le reggae, plus couramment associés dans l’inconscient collectif à la bière et à la « fumette », ont prouvé ce week-end qu’il savaient se tenir en présence des meilleurs crus bourguignons. Mieux, ils ont donné à nos chers produits du terroir la rondeur qui leur fait parfois défaut, tant le succès des bourgognes a propulsé certaines appellations sur un marché mondial qui les a éloignées de l’accessibilité et de la proximité la plus basique.
Fort heureusement, d’autres crus comme dans le Mâconnais ou le Châtilllonnais, voire plus près de Dijon comme à Marsannay, ont gardé leur sens du partage et de la convivialité, donnant un joli champ d’expression à l’Œno Music Festival. Le vin s’impose alors comme un outil pédagogique au profit de l’éveil des sens et, finalement, de la raison.
Cela était en tous points remarquable tout au long du week-end, au Bar des Indépendants que nous animions avec nos confères de la Gazette de Côte-d’Or, au cœur du Village des vins où l’on a vu quelques artistes dont le sympathique Renan Luce jouer les prolongations.
Il n’y a donc pas de mal à se faire du bien et l’Œno Music Festival a au moins gagné le succès d’estime. Pierre-Yves Romano, le promoteur de l’événement a fait un pari musclé. Pari tenu dans l’esprit même si, c’est le propre de toute aventure qui commence, beaucoup de choses peuvent être améliorées notamment dans la gestion des espaces physiques entre vin et musique, pas toujours faciles à maîtriser il est vrai.
Le vin à son « Zénith »
Mais parler d’améliorations c’est déjà parler d’avenir. Pyrprod et Luna prod connaissent la musique. Leur programmation exceptionnelle et équilibrée (27 groupes de joli niveau sur 3 scènes), fait déjà de ce festival une référence.
Reste à savoir comment l’aventure devra se poursuivre. Car l’argent, ce nerf de la guerre sans qui rien ne serait possible, risquerait de manquer un peu. L’organisation avait anticipé des pertes d’exploitations considérées comme naturelles les premières éditions d’un événement de cette ampleur. Rien de neuf à l’horizon, il suffit de regarder l’histoire des festivals pour s’en rendre compte.
Pour autant, avec une jauge que l’on peut situer aux alentours de 10000 visiteurs, pas tous payants, on semble un peu plus loin de l’équilibre que prévu. Même si cette transformation réussie du Zénith, avec ses faux airs de « mini woodstock » (restons modestes), a donné le sentiment de se retrouver en présence d’un flot continu de festivaliers visiblement heureux d’être là. Et c’est bien cela le principal.
Sans doute l’Œno Music Festival mérite-t-il de poursuivre sur sa voie. Construit grâce à une initiative privée et a priori pas très gourmande de fonds publics, il serait dommage de ne pas lui donner toutes les chances de devenir, pour Dijon, le festival du genre dont la ville a besoin dans ses ambitions aussi gourmandes que populaires. Après tout, le vin ne s’est jamais si bien trouvé à son « Zénith ».