La Foire internationale et gastronomique de Dijon est une belle mécanique qui a son temple de l’art de vivre: le Quartier des saveurs, initié par Pierre Guez et Dijon Céréales. Il place les chefs au cœur de l’événement le plus populaire de la région avec, au fond de l’assiette, l’inéluctable rapprochement entre Bourgogne et Franche-Comté. Un bon moyen pour les plus gourmands de se taper la cloche tout en faisant la foire.
Par Dominique Bruillot
Photos: D.R.
On ne va pas se mentir: depuis qu’il existe, le Quartier des saveurs a su redonner à la Foire de Dijon une véritable dimension gastronomique. Sans la volonté tenace de Pierre Guez, l’affaire n’aurait pas le même écho, voire serait restée sur le menu sans être servie à table. Pour la sixième année consécutive, 14 chefs vont donc se succéder au Restaurant des saveurs (voir liste plus bas), pour titiller les papilles et montrer (mais qui en doutait vraiment?) que la Bourgogne est un formidable réservoir de talents en cuisine
Mais pas que. Autour du Restaurant des saveurs, qui accommode chaque jour l’exigence du haut goût à l’esprit populaire de la foire, le monde de l’agroalimentaire compose avec l’artisanat des arts de la table et tente de trouver le juste compromis dans une société désespérément pressée et consumériste à outrance lorsqu’il s’agit de se nourrir.
Une fusion dans l’assiette
Le Quartier des saveurs propose ainsi de comprendre le processus de fabrication du pain et de redécouvrir le rôle et la bonne lecture de la viande. Il s’enrichit de la venue des valeurs sportives (le DFCO sera présent les 6 et 7 novembre), de l’innovation (le pôle d’excellence Vitagora bien entendu) tout en cultivant le respect des « classiques » territoriaux (escargots et truffes grises, cassis et fromages régionaux), le tout sous l’étendard commun de la Bourgogne… et de la Franche-Comté.
Car voilà l’un des messages forts du millésime en cours. Pierre Guez, le patron de Dijon Céréales et président de Vitagora, revendique haut et fort la légitimité du rapprochement, voire de la fusion entre les deux régions. On ne peut pas lui donner tort tant ce schéma désormais admis dans les pensées est pétri de bon sens et mijoté à la juste mesure des enjeux internationaux. La Bourgogne aura donc des parfums de comté en cette édition 2014. Sur son élan, l’histoire en marche s’écrira au cœur de l’assiette.
Grâce au Restaurant des saveurs, on a déjà l’assurance de pouvoir se taper la cloche tout en faisant la foire. Ce qui, convenons-en, ne fait pas de mal par les temps qui courent. Mais ce n’est là que la partie visible d’un flot de projets qui promettent de remettre le circuit-court et la Cité (promise) de la gastronomie au cœur d’une dynamique à laquelle tout le monde veut croire.
Un quartier symbolique
Pierre Guez, il faut le rappeler, est à la tête d’une coopérative agricole de belle taille si on la rapporte à l’échelle de nos frontières régionales. Mais il sait très bien, lui le fils de paysan, que pour affronter les incohérences du monde actuel de l’agriculture, il faut être aussi fort que fin. « Rapprocher le producteur du consommateur » en encourageant le rapport direct et local est une étape du chemin. Demain, malgré tout, il faudra peser sur les marchés.
Cela reviendrait donc à favoriser l’union des coopératives voisines et s’inscrire dans un schéma stratégique où la puissance d’un collectif de producteurs sera une protection pour nos produits locaux choyés par les nouveaux mercenaires du terroir. Il n’est pas interdit de penser que, dans quelques années, un méga système coopératif embrassant la Bourgogne et la Franche-Comté veillera au grain.
De nombreux sujets sensibles, à l’image du rachat il y a deux ans de la fromagerie Berthaut par le groupe Bongrain, rappellent ainsi que les frontières entre le terroir et le monde industriel sont ténues. Mais là aussi, Pierre Guez, qui assume son rôle (inattendu et souhaité par le nouveau propriétaire) de président de ladite fromagerie, entend défendre l’intégrité de ce produit très emblématique de la Bourgogne. Seule une action vigilante et concertée, en bonne intelligence entre un terroir que l’on idéalise souvent avec angélisme et une réalité commerciale heureusement bordée par la technocratique sécurisation alimentaire fera le lien et l’harmonie.
C’est donc au cœur de cette complexité qu’il convient de resituer la valeur symbolique de ce Quartier des saveurs qui, lui-même, donne sens à la vénérable Foire Internationale et Gastronomique de Dijon. Signe révélateur de cette évolution bienfaisante, le quartier en question va se coller à la Table de Luculus, une institution dans l’institution qui ne demande qu’à aiguiser plus encore les appétits.
Foire gastronomique de Dijon, du 31 octobre au 11 novembre, Palais des expositions.
Quartier des saveurs, aux commandes:
– Vincent Bourdon, Les Œnophiles à Dijon (31 octobre);
– Emmanuel Hebrard, Abbaye de la Bussière* (1er novembre);
– Edouard Mignot, Edem* à Chassagne-Montrachet (2 novembre);
– Jean-Michel Lorain, La Côte Saint-Jacques*** à Joigny (3 novembre);
– Romuald Fassenet* (Sampans, 39) et Yoann Chapuis* (Tournus, 71), (4 novembre);
– Gonzalo Pineiro, Le Château Bourgogne à Dijon (5 novembre);
– Philippe Auge, l’Hostellerie de Levernois* près de Beaune (6 novembre);
– Laurent Peugeot, Le Charlemagne* à Pernand-Vergelesses (7 novembre);
– Eric Briones, Les trois ducs à Daix (8 novembre);
– Rui Paula DOC et DOP au Portugal (9 novembre);
– Nicolas Isnard et David Lecomte de l’Auberge de la Charme* à Prenois (10 novembre);
– Stéphane Derbord* à Dijon (11 novembre).
Prix unique du repas: 60 euros.
Pour tout savoir: www-restaurant-des-saveurs.com
Réservations à partir du 6 octobre: 03.80.69.21.00
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