Approvisionner les restaurants collectifs des collèges et autres Ehpad côte-d’oriens avec des produits locaux, et donner du travail aux producteurs des environs. Tels sont les objectifs d’Agrilocal21, une plateforme en ligne soutenue par le Conseil départemental, qui promeut un localisme gourmand.
Par Arnaud Morel
Photos D.R. sauf mention contraire
L’heure est au localisme. Acheter local est plus que jamais synonyme de produits frais de qualité, avec un impact environnemental limité. Chacun s’accorde sur les vertus du modèle, qu’il s’agit encore de mettre en pratique. Forcément localement. Au sein du Conseil départemental de Côte-d’Or, le thème est labouré, si l’on ose dire, depuis 2011, avec une nette intensification depuis 2017, et le lancement d’une des pièces majeures de la politique conduite en la matière : Agrilocal21, une plateforme de mise en relation des producteurs locaux (maraîchers, éleveurs, fromagers…) avec les acheteurs départementaux, cuisiniers de collège ou d’Ehpad notamment.
une passerelle entre producteurs et acheteurs
L’idée est toute simple, frappée au coin du bon sens : référencer les producteurs locaux, et permettre aux établissements de leur passer commande très simplement. Car, outre la démarche d’acheter proche du lieu de consommation, avec tous les bénéfices à en attendre en matière de saisonnalité des produits, la plateforme lisse les difficultés juridiques qu’il y a à passer des commandes dans le cadre de marchés publics. En quelques clics, le cuisinier désireux de s’approvisionner, en tomates par exemple, édite son appel d’offre, auquel répondent les producteurs qui le souhaitent, tout aussi simplement. La prise effectivement de commande, la réalisation du bon sont également au menu de la plateforme. Tous les producteurs référencés sont géolocalisés sur une carte, permettant aux acheteurs de cibler géographiquement leur commande, et de découvrir le tissu local des producteurs autour d’eux.
« Ça me facilite la vie, assure Coralie Lejemble, responsable de la cuisine du collège Henry-Berger à Fontaine-Française. Notre collège, plutôt petit, est assez éloigné de Dijon. Je sers environ 170 repas par jour, et Agrilocal21 offre la souplesse dont j’ai besoin pour établir mes menus cinq semaines à l’avance. J’ai en outre découvert des exploitations agricoles voisines dont je n’avais pas connaissance. » En deux années d’existence, le service référence déjà 92 producteurs, et a enregistré 252 commandes pour un montant de 42 000 euros. Un démarrage solide, qui devrait monter en puissance après avoir levé les derniers freins au développement du système.
Le frein du transport
Pour renforcer la connaissance du réseau, il a été décidé l’organisation d’un salon annuel où sont réunis producteurs et acheteurs. Le premier s’est tenu le 2 octobre dernier, avec quelque 35 artisans et agriculteurs venus au Conseil départemental rencontrer les cuisiniers et intendants d’établissements côte-d’oriens.
Autre point à améliorer : l’acheminement des marchandises. « Nous engageons une réflexion pour améliorer et structurer l’aspect logistique de notre service. Certains établissements sont éloignés des producteurs, ou commandent en trop petite quantité, ce qui pose quelques difficultés d’acheminement des produits. Il nous faut identifier les acteurs logistiques au plus près des territoires, au besoin les faire émerger, si possible en développant l’aspect insertion que peuvent offrir ces métiers », analyse Peggy Le Nizerhy, la directrice du service Agriculture et Environnement du Département de Côte-d’Or. Mathias Colson, producteur de produits laitiers à la ferme de Labergement (Moloy), qui utilise également les services d’Agrilocal21 « trois à quatre fois par mois » a aussi identifié cet écueil : « La commande publique représente 20 % de ma production de fromage blanc, ce qui est déjà très bien. Mais comme c’est moi qui prends en charge la livraison, je limite volontairement mon rayon d’action, pour modérer les frais. »
Légumes bio à la cantine
Assurer l’approvisionnement local des cantines de collèges et d’établissements d’accueil de personnes âgées s’avère également plus compliqué pour certains produits, notamment maraîchers. Sous l’impulsion de François Sauvadet, le président du Conseil départemental, et de Marc Frot, le vice-président en charge de l’Agriculture, la collectivité devient directement productrice de légumes, car l’offre reste, dans ce secteur, insuffisante. Ce constat a conduit la collectivité à acheter, en octobre 2017, 20 hectares de terres agricoles à Perrigny-lès-Dijon, où elle compte installer des maraîchers pour produire des légumes adaptés à la restauration collective.
Mais pas seulement. « Nous affecterons 15 hectares à la production de légumes bio, et deux parcelles pour l’apprentissage du métier et des expérimentations de maraîchage sur petite surface », détaille Peggy Le Nizerhy. Ainsi, 1,5 hectare sera ouvert aux apprentis maraîchers, notamment aux élèves en brevet professionnel de responsable d’exploitation agricole (BPREA), tandis qu’un hectare sera dévolu aux expérimentations sur le maraîchage en petite surface, une variante de la permaculture. Les premiers légumes devraient arriver sur les tables des collégiens en 2021. Pour l’heure, la parcelle départementale, en phase de conversion bio, est plantée en céréales. Le Département doit encore réaliser plusieurs aménagements – un bassin de rétention d’eau et des locaux – pour rendre son terrain opérationnel. Au total, l’opération mobilisera 2 millions d’euros de crédit pour l’achat des terres et leur aménagement. Le prix pour assurer un approvisionnement régulier en légumes locaux et bio.