Le fondateur des Hospices de Beaune a été retrouvé de façon quasi formelle dans le sous-sol d’Autun, jeudi 3 décembre 2020. La découverte du tombeau du chancelier du duc de Bourgogne, personnage central de la Bourgogne du XVe siècle, est exceptionnelle.
On a retrouvé Nicolas Rolin grâce à son éperon, a annoncé ce jeudi 3 décembre le service archéologique de la Ville d’Autun. C’est un polar médiéval, ou renaissant plutôt. La tombe est située à l’emplacement d’une ancienne église, place Saint Louis à Autun. Huit crânes ont été exhumés, et c’est grâce au talon d’un des défunts qu’on a pu résoudre l’énigme. Et identifier un des hommes les plus puissants de Bourgogne. L’éperon fixé au talon ne souffre d’aucun doute, puisque le Chancelier avait été inhumé avec cet attribut. Cette roue à pointes –semblable à celle du cowboy désireux de stimuler sa monture –, lui appartient.
C’est une découverte considérable. Elle boucle la boucle de l’existence d’un génie de la Renaissance, initiateur à la cour ducale du rêve européen. Pourtant, le gaillard avait semé de fausses pistes. Son nom d’abord, qui oscille entre Rolin et Rollin. Sa date de naissance, ensuite, puisqu’il serait né vers 1376. Pour le reste, tout est sûr. Et impressionnant. Le natif d’Autun issu de la bonne bourgeoisie saura se faire apprécier. À la cour de Jean sans Peur d’abord, dont il devient l’avocat. À celle de Philippe le Bon surtout, dont il sera le plus proche et influent conseiller. Un super ministre, une sorte de Richelieu.
Nicolas Rolin, acteur de la paix entre Bourgogne et France
Trouver les restes de Nicolas Rolin aujourd’hui signifie lui redonner une nouvelle vie. On redécouvrira alors son rayonnement. Et son génie, puisqu’on lui doit entre autres, à peine sorti de la Guerre de Cent ans, la fondation des Hospices de Beaune « pour les pauvres malades ». Il le fera avec sa troisième épouse, Guigonne de Salins, créant au passage Le Sœurs Hospitalières, un nouvel ordre religieux.
Son empreinte politique est considérable. C’est à lui qu’on doit le traité d’Arras, qui acte la paix (en 1435) entre la Bourgogne et la France. Sa fortune était immense. Au partage de ses biens, on comptera 22 châteaux et cinq maisons fortes en Bourgogne, et de très nombreuses seigneuries. De quoi se rendre indispensable, jouer les bons intermédiaires, et payer par exemple personnellement la rançon de Jeanne d’Arc.
Prospérité donc. Mais le Chancelier du Duc n’a pas oublié sa postérité. Et de commander un tableau à Jan van Eyck. On y voit (au musée du Louvre) lui, la Vierge et Jésus bénissant le brave homme. Qui mourut – excusez du peu – à 86 ans. Avec l’éperon de l’éternité.
Philippe Duley
À propos de l’auteur
Philippe Duley, Autunois comme Rolin
Philippe Duley est un journaliste né à Dijon, au quartier des Bourroches. Nicolas Rolin n’est en rien un inconnu pour lui : sa carrière a débuté à Autun, au sein de l’agence locale du Courrier de Saône-et-Loire. Il fut ensuite rédacteur en chef du Parisien et de Aujourd’hui en France. Ex directeur général de l’Ecole Supérieure de Journalisme de Paris, il est aujourd’hui directeur pédagogique de l’IICP (groupe Galileo, 3e au monde). Il a écrit de nombreux ouvrages, dont Infirmières, histoire et combats (La Martinière, 2020), Montmartre, le tourbillon de la vie » (Editions du Palais, 2018), Entretien avec Daril Boubakeur (Kero, 2016), Nancy (Editions de l’Est)…