Terre de Saône livre une quarantaine de grandes surfaces avec sa production de légumes à Auxonne. Cette filiale de Dijon Céréales envoie donc un message positif à un secteur agricole en difficulté, même si la réalité du champ à l’assiette est plus nuancée.
En s’avançant entre les rangs de salades, aux abords immédiats de la ville d’Auxonne, le promeneur n’a pas de mal à comprendre qu’il chemine en terre maraîchère. La terre est légère, un peu sablonneuse, apportée par les limons de la Saône toute proche. Ici, on cultive depuis toujours les salades, les pommes de terre ou les oignons, dont l’odeur flotte toujours un peu au-dessus de la ville, au point d’en devenir une sorte de signature olfactive. Le maraîchage, pourtant, est à la peine. Si certains exploitants parviennent à écouler à bon prix leur production sur les marchés locaux, la filière vit sur une économie nettement plus tendue lorsqu’elle vend aux grandes et moyennes surfaces. Toujours les mêmes causes et les mêmes effets : les marges réduites au minimum ne permettent de vivre qu’en cultivant de vastes surfaces, et en ayant recours à la mécanisation.
C’est sans doute ce constat qui a conduit à l’émergence d’un groupe de production et de distribution local, baptisé Terre de Saône, filiale de Dijon Céréales depuis les années 2000. L’entreprise, qui emploie 12 salariés, cultive 43 hectares de terres maraîchères et travaille avec une trentaine de producteurs locaux. Elle génère plus de trois millions d’euros de volume d’affaires, dispose d’une plateforme de lavage et d’une autre pour la logistique, équipée de vastes entrepôts frigorifiques.
Confinement révélateur
Avec sa taille respectable, Terre de Saône a pu établir un réseau de distribution fort d’une quarantaine de grandes surfaces, principalement en Côte-d’Or, mais également dans toute la région Bourgogne-Franche-Comté. « Nous livrons quotidiennement une quinzaine de magasins Intermarché, mais aussi deux hypermarchés Cora, ainsi que des magasins Attac et Metro », témoigne Emmanuel Richomme, le directeur de la structure. Son entreprise prouve qu’il est possible de conjuguer approvisionnement local et grande distribution, une martingale que cherchent de nombreux exploitants agricoles. Les avantages d’un tel système sont apparus évidents, tiens donc, pendant la période du confinement. « Les centrales d’achat des grandes surfaces ne pouvaient plus approvisionner les boutiques, elles ont été bien contentes de nous trouver avec nos livraisons en direct », poursuit le directeur.
« Les centrales d’achat des grandes surfaces ne pouvaient plus approvisionner les boutiques, elles ont été bien contentes de nous trouver avec nos livraisons en direct. »
La demande de la clientèle s’est également renforcée pour les produits locaux, on l’a assez dit. « Ces derniers mois, l’attrait des consommateurs pour un approvisionnement local en légumes a été remis fortement en avant, c’est vrai. Il s’incarne dans la marque Savoir-faire 100 % Côte-d’Or que Terre de Saône affiche désormais sur ses produits, ou le projet de légumerie à Villers-les-Pots en lien avec le Conseil départemental pour approvisionner les collectivités, dont nous sommes partenaires », confirme Christophe Richardot, directeur général de Dijon Céréales.
Terre de Saône : fraicheur et traçabilité
Fraîcheur et traçabilité sont les maîtres mots de cette logistique. Terre de Saône pratique l’agriculture raisonnée et utilise un outil nommé Végétrace qui recense l’ensemble des interventions sur la culture, pour garantir qualité et sécurité alimentaire. En 2019, l’entreprise auxonnaise a produit 3545 tonnes de pommes de terre, salades, carottes, choux et poireaux. « Sur le maraîchage pur, nous représentons environ 70 % de toute la production du bassin d’Auxonne », se félicite son gérant.
Tout n’est pas rose pour autant. Terre de Saône est passée près de la catastrophe et a dû réduire ses effectifs de presque moitié il y a quatre ans. « Une structure comme la nôtre est tout à fait concurrentielle vis-à-vis des productions qui viennent d’Espagne ou d’Italie, ce qui est une bonne chose pour promouvoir les productions locales. Mais c’est au prix de marges réduites qui peuvent nous fragiliser », analyse Emmanuel Richomme. Le chemin allant du champ au consommateur, fût-il tracé sur la terre légère des rives de Sâone, n’est donc encore pas totalement dégagé.