Des messages heureux avenue du Mail, voilà qui est plein de bon sens. Avec son pinceau et ses couleurs apaisantes, Véronique Barrillot associe des personnages célèbres à des « poulbots » résidant sur place. Une révolution dans le quotidien de 11 halls d’immeubles gérés par Orvitis à Talant.
L’artiste posant devant Dali et un jeune résident, dans un logement Orvitis à Talant.
Par Dominique Bruillot – Photo : Jean-Luc Petit
Pour Dijon-Beaune 73 Mag
Avenue du Mail à Talant, un matin gris de novembre. Dans le hall de l’immeuble, Véronique Barrillot peaufine son Charlie Chaplin joyeux et goguenard. « Bientôt, un kid lui tiendra la main », s’enthousiasme l’artiste. Un kid ? En réalité la représentation d’un enfant de l’immeuble, comme elle le pratique dans une dizaine d’autres halls dont elle a supervisé la totale rénovation.
Chaplin, Einstein et les mômes
Au départ, c’est une sollicitation d’Orvitis. Christophe Bérion, le directeur général du bailleur social, souhaitait amener l’art dans le quotidien des habitants de ces HLM qui appartiennent à l’histoire talantaise. Saisie au bond par Véronique et relayée par la Ville de Talant, cette belle histoire prend forme et agit déjà sur les comportements. « Tant qu’à faire, autant apporter une vraie cohérence à cette initiative, sur des murs qui ont du vécu certes, mais pas si dégradés que cela », commente la signataire des ouvrages, qui s’est plu à encadrer l’ensemble du chantier.
D’où ce choix d’un carrelage sombre au sol et d’une peinture thermolaquée aux couleurs de Mondrian sur les boîtes aux lettres dont la réalisation est assurée par les techniciens d’Orvitis. Des détails qui n’en sont pas, surtout quand on se retrouve face au résultat. « Il fallait intemporaliser le plus possible ces lieux d’accueil, les harmoniser tout en provoquant des réactions créatives entre les gens, des échanges. »
De la poésie et du cœur
Et ça marche. Chaplin, Einstein et les autres personnages inventés par Véronique se partagent la vedette avec quelques « poulbots » du quartier. Partout aussi, l’artiste a placé des miroirs (« un accessoire indispensable dans un hall ») au milieu de ses dessins, et relié le tout avec un fil de peinture toujours porté sur la douceur poétique de l’imaginaire : une pellicule pour l’évocation du cinéma, des fleurs pour celle d’un jardin extraordinaire, une ligne rouge qui fait battre le cœur de Charlie, etc.
Tout, ici, est cohérent. Miroir, boîtes aux lettres, personnages et poulbots. Dans le quartier du Mail, on peut désormais désigner son immeuble parce qu’il représente, ce qu’il suggère. « Parfois, les gens confondent Dali et Picasso, du coup, cela interpelle et cela permet de glisser des informations d’une nature différente dans les esprits, avec de la poésie et du cœur », s’amuse encore l’auteure, qui apprécie particulièrement la gentillesse de celles et ceux qui assistent depuis plusieurs semaines à son travail.
L’artiste vit ainsi en immersion dans ces immeubles grouillant de vie. Elle est le premier témoin d’un quotidien qu’elle s’attache à humaniser le plus possible avec une philosophie de circonstance : « Je suis curieuse de voir comment cela sera perçu dans quelques années. » Et nous aussi.