Le château de Marsannay est naturellement appelé à devenir le phare œnotouristique de la région dijonnaise. Son directeur Sylvain Pabion s’en donne les moyens, jusque dans le moindre détail de ses sols, dont il livre une pédagogie intelligente, monolithes à l’appui.
Par Dominique Bruillot
Pour Bourgogne Magazine #54
Photos : Christophe Remondière
On ne va pas se cacher derrière son petit doigt, le château de Marsannay a longtemps été considéré comme un lieu sympathique, certes, imaginé par le prolifique et génial André Boisseaux, mais plus orienté vers le monde touristique que vers les véritables amateurs de l’appellation. Depuis la reprise en main du site par Olivier Halley, sous la conduite de Stéphane Follin-Arbelet, on sent bien que le vent tourne dans le bon sens. Ce lieu doué d’un énorme potentiel est enfin porté vers de nouvelles destinations qui devraient en faire, à terme, le phare de la renaissante région viticole dijonnaise.
Un pari bien engagé
Cela a déjà commencé par le travail de la vigne et de la vinification, nous y reviendrons. Sylvain Pabion et son équipe produisent en effet des vins élégants, souples et accessibles, finement reliés à la subtilité du complexe terroir local. Sur fût, le dernier millésime qu’il nous fut donner de déguster, confirme cette maîtrise nouvelle qui, une chose en expliquant une autre, va de pair avec une communication pleinement rétablie avec les autres acteurs de l’appellation. Du point de vue du produit, le pari est donc bien engagé.
Mais le château de Marsannay, c’est aussi un site qui se visite, dans lequel la pédagogie peut s’exprimer pleinement. Au cœur du vignoble, à deux pas de Dijon, il est the place to be quand on veut franchir quelques caps de la connaissance viticole, en toute décontraction.
Ici, on jongle notamment avec les climats de l’appellation la plus directement concernée, Marsannay. Clos du Roy, Les Grandes Vignes, Les Longeroies, Clos de Jeu, Les Favières, la Plantelle (une vigne des Hospices de Dijon) : l’offre pourrait difficilement être plus représentative.
Monolithes pédagogiques
Alors, entre deux dégustations ou réceptions (une salle de 400 m2 est prévue à cet effet), et dans la foulée d’un propos savamment amené vers une présentation générale des ducs, des moines et de la Bourgogne en général, un outil particulièrement élaboré a été mis en place avec le concours de l’Institut Jules Guyot. Avec, en préambule, les travaux de la géologue Françoise Vannier-Petit, qui permettent aujourd’hui de disposer d’une description très fine des terroirs de l’AOP, dont une quinzaine de climats (sur 78 au total) font l’objet d’une demande de classement en Premier Cru.
Grâce à un procédé mis au point par l’Université, on peut en effet comparer dans leur dimension réelle et figée à jamais dans leur verticalité, ce que les racines vont trouver d’un sol à un autre. « On a voulu sortir des cours magistraux pour aller vers des notions beaucoup plus terriennes », résume Benjamin Bois, spécialiste des relations entre le climat (au sens météorologique du terme) et la vigne. Sur 1,2 m de hauteur, le monolithe (c’est son nom), livre sa vérité. Ainsi en est-il des Echezots (à ne surtout pas confondre avec le grand cru Echezeaux). « Ça se fracture, ça se dégrade, ça libère des argiles qui garantissent une contrainte hydrique, donc un régime d’alimentation en eau équilibré », commente l’expert, en présence du monolithe. Mais là s’arrêtera notre mise en bouche, car rien ne remplacera jamais une visite in situ. Contempler ces œuvres inspirées par le terroir demeure le plus efficace des cours.