Auréolé de lumières, au loin, on ne voit que lui. Pourtant, ce Château-Gris qui fait la fierté d’Albéric Bichot et de sa famille a la taille d’une petite folie joyeuse. C’est son écrin, 3 hectares et demi de Nuits-Saint-Georges premier cru, qui en fait encore plus la valeur…
Le Château-Gris intègre le périmètre de la famille Bichot au début des années 70, quand le père et le grand-père d’Albéric rachètent la maison nuitonne Lupé-Cholet. L’acquisition, jumelée à celle du Clos Frantin, permet à la maison beaunoise de prendre cep en terre nuitonne. « Albé » le voit comme une madeleine de Proust : « On ne va pas faire dans le romantisme idiot, mais quand on avait près de 10 ans, on adorait se promener autour du château, il y avait tellement de choses à voir… »
L’édifice trompe son monde. Quand on le contemple depuis l’A31, auréolé de sa couronne lumineuse, il impressionne. Vu de près, c’est tout autre chose. Château-Gris est une sorte de petite folie (du nom de ces maisons de villégiature bourgeoises), qui capitalise 70 m2 au sol et n’a jamais été habitée. Sa position à flan de roche et de calcaire le rend dominant, un poil prétentieux, joliet quoiqu’il en soit. Mais comme il n’est pas troglodyte, l’édifice n’a aucune profondeur. Il en impose, tout simplement. Avec une sacrée personnalité et une certaine capacité à gonfler le torse.
« C’était un lieu de loisir », rappelle le propriétaire des lieux. Ce petit côté esbroufe va de pair avec de nombreuses autres singularités. L’écrin est ainsi plus surprenant que le bijou en lui-même. Le petit château qui a tout d’un grand surplombe un terroir exceptionnel, 3,5 hectares au total, répartis sur 7 terrasses. Une configuration unique en Bourgogne.
Historiquement, nous sommes au lieu-dit Les Crôts. Mais cette parcelle de premier cru devient le climat Château-Gris lorsqu’il se livre en version pinot noir (2,85 ha), ou Les Terrasses lorsqu’il donne un peu de chardonnay (0,65 ha), autre caractère exceptionnel d’une production certifiée en viticulture biologique. La disposition en terrasses influence la nature du vin. Entre les terres profondes du bas, la puissance et la fraîcheur élégante des parties élevées, son assemblage lui confère une complexité rare.
À l’époque de la Restauration, qui signe son acte de naissance, les Nuitons s’entrainaient au tir à l’arc, à l’ombre du petit château. Celui-ci a été couvert de tuiles grises après le phylloxéra, en rupture avec les pratiques territoriales, ce qui lui valut son nom. Il méritait donc bien d’être sous les projecteurs. Mais attention, pas n’importe comment. Très attaché à l’empreinte biologique qui s’empare de ses différents domaines, Albéric Bichot tient à préciser que sa petite folie n’a rien d’une folie énergétique : « Au début, on s’est fait allumer sur le sujet, alors que nos 110 spots consomment l’équivalent de cinq ampoules de 300 watts. » Nous avons ainsi le plaisir de faire toute la lumière sur cette affaire.