C’est le générique de fin d’une saga familiale locale. Fervente défenseure d’un cinéma de centre-ville indépendant, Sylvie Massu rendra dans quelques jours les clés des cinémas Darcy et Olympia à Dijon. Elle refait le film de sa carrière pour DijonBeaune.fr.

Le film est terminé. Dans quelques jours, Sylvie Massu aura officiellement cédé l’exploitation des cinémas Darcy et Olympia de Dijon au groupe Cinéville : « Il reste quelques petits détails administratifs à régler. » Ce projet trottait dans la tête de la gérante de ces deux institutions dijonnaises depuis de longs mois.
Le Darcy-Palace de son premier nom, inauguré en 1914, était dans la famille Massu depuis 64 ans. Et les murs le restent. « Cette aventure, je la dois à mon papa (ndlr, Marcel Jean Massu, figure du cinéma dijonnais, décédé en 2016 à l’âge de 94 ans). Il a commencé avec son cinéma itinérant pendant la Seconde Guerre mondiale, puis sa première salle à Mâlain avant de racheter le Darcy-Palace en 1964 : le rêve de sa vie ! »



Marcel Jean Massu (à gauche) avec ses amis distributeurs Pierre Dardun (à droite) et Maurice Bouchenay (en arrière-plan), en 1967. ©Famille Massu
L’Olympia, le projet de sa vie
Sylvie Massu hérite naturellement du vaisseau amiral de la famille à la fin du siècle dernier. En 2007, elle reprend le cinéma Olympia. « Cette fois, c’était mon projet », sourit-elle, fière de ce qu’elle a entrepris jusqu’ici : « Je n’ai pas à rougir de mes salles, et encore moins d’avoir été la seule indépendante privée de Dijon. » Mère de trois enfants cinéphiles, Sylvie Massu a d’abord rêvé d’une transmission familiale pour ses deux salles aux 340 000 entrées en 2024. « Ils sont déjà investis dans d’autres projets professionnels. J’ai donc cherché ailleurs. » L’offre de Cinéville, propriétaire d’une vingtaine de cinémas dont une grande majorité dans l’Ouest de la France (26 M€ de chiffre d’affaires en 2022), était la plus crédible à ses yeux : « C’est un groupe qui privilégie l’humain, la qualité et la proximité », assure-t-elle.
Avant de signer la cession, l’entrepreneuse dijonnaise s’est assurée que « la très grande majorité de la vingtaine de salariés seront conservés ». Une clause indispensable pour Sylvie Massu, bien consciente que le nouvel exploitant procèdera tout de même à des changements dans les mois qui viennent. « Mais je suis certaine que le nom du Darcy continuera à perdurer longtemps sur le fronton de l’établissement ».

« Le cinéma chez soi, c’est un passe-temps. Dans une salle, c’est un spectacle ! »
Sylvie Massu, future ex-gérante des cinémas Darcy et Olympia de Dijon
« Le cinéma dans une salle, c’est un spectacle »
Confortablement installée dans une salle du cinéma Olympia, Sylvie Massu refait le film de sa carrière au cours de laquelle elle a observé d’importantes mutations. « Les plateformes de streaming et la crise sanitaire nous ont fait douter, mais le souffle est retombé. Avouez que voir Le Comte de Monte-Cristo sur un écran de 16m, ce n’est pas la même chose que sur son ordinateur. » Le cinéma n’est pas mort, en attestent les plus de 10 millions d’entrées pour Un p’tit truc en plus, sorti en mai 2024. « Je me souviens aussi de la projection de Bienvenue chez les ch’tis, la salle entière riait aux éclats. Le cinéma chez soi, c’est un passe-temps. Dans une salle, c’est un spectacle ! »
Sylvie Massu retient le sentiment d’avoir fait de sa passion pour le grand écran un métier : « J’ai toujours travaillé avec mon père. Je suis née dans le cinéma. C’est un beau métier, exigeant aussi car nous sommes ouverts 365 jours par an jusqu’à minuit. C’est tellement agréable de donner du rêve aux gens. » Lorsqu’elle aura remis les clés de ses deux établissements, Sylvie Massu pourra se consacrer à de nouveaux projets. « Je vais continuer de travailler avec le festival Les Écrans de l’Aventure, que nous accueillons depuis 2009. J’y suis très attachée, je servirai de relai local aux organisateurs. »
Entre deux projections d’Un Ours dans le Jura et de Vingt Dieux, Sylvie Massu finalise la cession : « Je pars la tête haute. Je transmets un patrimoine mais aussi une belle équipe. » Le rideau sur l’écran est tombé.