Ce mardi 20 février, l’Alliance pour le logement en Bourgogne-Franche-Comté s’est réunie à Perrigny-lès-Dijon pour faire entendre les difficultés du secteur. Exsangues, les acteurs régionaux haussent le ton et demandent un plan d’action immédiat.
Par Amélie Brenon
« Il y a urgence ! » Le cri du cœur est collectif. Fédération française du Bâtiment (FFB), Union sociale pour l’habitat (USH), Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM) et bien d’autres encore : réunis sous la même bannière, les acteurs du logement en Bourgogne-Franche-Comté ont organisé une opération coup de poing depuis Perrigny-lès-Dijon. Ici, dans le futur quartier « Les Charmes du Petit Bois », programmes privés et publics sont à l’arrêt.
Un exemple local parmi tant d’autres, révélateur des profondes difficultés que connaissent les secteurs de la construction et du logement, impactant directement leur million et demi d’actifs (6% de l’emploi en France) pour environ 6% du PIB.
Premier constat implacable : la hausse des taux d’intérêt a rendu difficile l’accès à la propriété pour les ménages. « L’effondrement de la demande est la cause principale de la crise », rapporte Corinne Deseille. La présidente régionale de la FFB constate en outre « un recul de 17% de la mise en chantier à fin novembre, en cumul de douze mois ». Une situation qui impacte les entreprises du bâtiment, confrontées à l’épuisement de leurs carnets de commandes. « Avec 286 000 mises en chantier en 2023, nous frôlons le niveau bas de 1993. La France pourrait perdre jusqu’à 150 000 emplois sur deux ans », alerte son homologue côte-d’orien Stéphane Gazelle.
Le logement social dans le même bateau
Subissant le principe des vases communicants, le logement social n’échappe pas à cette tendance de fond. François-Xavier Dugourd préside l’Union sociale pour l’habitat de Bourgogne-Franche-Comté, un joli paquebot avec à son bord 29 organismes, pour 188 000 logements et 355 000 personnes accueillies. Il voit venir de loin la vague de la crise : « Aux carences de l’offre est venu s’ajouter un effondrement de la demande classique : les ménages n’arrivent plus à financer leur projet immobilier. Il en résulte un blocage complet de la chaîne du logement, faute de mobilité. Le nombre de demandeurs de logement social ne cesse d’augmenter, le parc locatif privé est embolisé, l’accession à la propriété se trouve désormais réservée aux ménages les plus aisés. Les conséquences économiques et sociales sont délétères sur notre territoire : mal-logement, allongement des trajets domicile-travail, étudiants qui renoncent à leurs études, entreprises qui peinent à recruter, etc. »
MaPrimeRénov’, le coup de poignard
Autre ombre au tableau : les difficultés pour répondre aux normes énergétiques. Entre les différentes crises simultanées et l’explosion des coûts de construction ou de rénovation, « l’effet ciseaux » tant décrié par la profession est souvent fatal. « En France, à partir de 2025, 150 000 logements ne pourront pas être loués en raison de leur diagnostic de performance énergétique (DPE) classé G », explique Christophe Lesou, administrateur de la FNAIM de Côte-d’Or. Une situation qui pourrait aggraver la pénurie de logement.
Les participants de cette action conjointe ont également fustigé les récentes annonces du ministre de l’Économie. Dimanche 18 février, Bruno Le Maire a en effet annoncé une économie d’un milliard sur le dispositif MaPrimeRénov’, une aide pour réaliser des travaux de rénovation énergétique. « À peine deux mois après le vote d’une loi de finances assez défavorable au bâtiment et au logement, le fait de revenir sur la seule mesure réellement positive est un coup de poignard », regrettait encore Stéphane Gazelle.
Étendre le prêt à taux zéro
Des propositions à l’intention du préfet et du gouvernement ont ainsi été détaillées, au premier rang desquelles figure l’extension du fameux prêt à taux zéro sur l’ensemble des communes du territoire. En Bourgogne-Franche-Comté, seules 18 communes – largement côte-d’oriennes – sur 3 700 sont concernées.
Concernant les bailleurs sociaux, une baisse de la TVA sur les travaux (actuellement à 10%) est aussi demandée. Les acteurs ont aussi besoin d’une simplification des normes (RE2020) qui « sont parfois contradictoires sur le terrain ».
La filière du logement entend poursuivre son action et montrer les muscles. « Nous n’avons pas de tracteurs, mais nous avons des grues », a conclu Corinne Deseille. Avant d’en arriver là, une rencontre est prévue, mercredi 21 février, avec le préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté, Franck Robine.