Le président de la Côte-dOr veut faire de son Département un « laboratoire français des modes de vie de demain ». Entouré de stratèges du développement durable et des entrepreneurs d’un think tank régional, François Sauvadet lance Futurs 21, un dispositif destiné à faire émerger ces projets qui amélioreront notre quotidien. Quitte à tendre la main en direction de François Rebsamen, lorsqu’il s’agit par exemple de réveiller les maraîchages autour de Dijon…
Par Dominique Bruillot
Allons-nous assister à un revers instinctif et quasi militant pour contrer cette tendance générale à la métropolisation dont le pays se pare depuis un certain temps? À en croire la détermination de François Sauvadet pour lancer son concept de Futurs 21, cela ne fait aucun doute. Pugnace, insatiable, ce n’est pas l’ancien ministre mais le président du Département qui parle : « Le fait urbain ne sera pas définitif ! » Face à lui, la presse régionale est venue assister à ce qui ressemble à une déclaration de guerre contre le « rural bashing ».
Une démarche « apolitique »
Le rendez-vous a des accents solennels. François Sauvadet est venu avec une armée de vice-présidents. « Nous ne partons pas de rien », prévient le géant de l’Auxois, et « tout ce que la loi nous permettra de faire, on le fera à fond ». François-Xavier Dugourd, par ailleurs président d’Orvitis, capitalise ainsi sur un monde plein de possibilités et donne l’exemple : « Grâce à de nouvelles solutions, on peut déjà produire de l’énergie avec certains types d’enrobés sur les routes, nous pouvons les tester. »
Pour Denis Thomas et Anne Parent, le binôme beaunois du Conseil départemental, très au fait de la chose viticole, ces idées neuves qui construisent l’avenir sont déjà incarnées par les stations de lavage de bouteilles. D’autres, comme Catherine Louis et Marc Frot, tous venus en soutien de leur chef de file y vont, qui de leurs chaufferies de bois, qui de ce monde agricole en remise en question, en quête de solutions durables et de proximité.
La démarche se dit « apolitique », elle joue la carte du futur « laboratoire français des modes de vie de demain ». François Sauvadet tend la main à toutes les bonnes volontés, celle de François Rebsamen comprise. Si tous veulent se joindre à lui dans un ambitieux plan de réconciliation du citoyen, fut-il rural, avec ce futur heureux qu’il se fera lui-même, alors, l’affaire sera bien engagée.
Utopiste, le géant de l’Auxois? Pas forcément, car on sent derrière l’effet d’annonce, la patte de deux têtes pensantes du monde entrepreneurial : Didier Livio et Jean-Philippe Girard. Le premier a créé à Dijon Synergence, une agence conseil qui a intégré le groupe Deloitte développement durable dont il est désormais l’un des dirigeants. Le second, avec Eurogerm, incarne la success story bourguignonne. On lui doit la création d’un think tank avide d’en découdre avec les idées reçues et le fatalisme provincial, le Cercle Entrepreneurs et territoires.
Dessiner demain
Au-delà de ces grandes déclarations d’intention, Futurs 21 vient en opposition à ce sentiment d’abandon dont souffriraient nos campagnes. Dans un contexte où le Conseil départemental est délesté de quelques compétences au profit de la métropole naissante, François Sauvadet ne manque pas de rappeler son rôle de vigie. L’originalité de son département repose sur sa normalité. Il ne se lasse pas de décrire la Côte-d’Or comme une « Petite France » aux proportions parfaites pour devenir un lieu de test grandeur réelle pour la nation entière. Ce « premier dispositif permanent, national et européen, d’accueil et d’accélération de l’innovation sociétale sur les questions de mode de vie », même si cela semble un peu compliqué à dire de la sorte, sera donc un outil laboratoire pour des projets qui vont faire du 21 une référence nationale. « The » référence, cela va de soi.
En aucun cas, il s’agira pour l’institution d’organiser les projets en lieu et place de leurs porteurs, mais bien de les repérer et de les accompagner. Avec ses 550 000 habitants dont plus de 40% résident dans une seule agglomération, ses déserts du nord et ses petites villes qui essaiment ses pays, la Côte-d’Or est un lieu d’études idéal pour « faire émerger des solutions nouvelles, pour dessiner demain. »
Le Département et ses nouveaux amis (Université, pôles d’excellences et réseaux divers) joueront leur rôle de déclencheur, de rassembleur et de révélateur, prêts à mettre en œuvre les moyens nécessaires pour que ces projets exemplaires avancent. Il faut faire en sorte que cette mainmise sur l’avenir, ne soit pas « uniquement réservée aux sachants », plaide François Sauvadet. Un comité de pilotage sera le guide de cette « transition socio-écologique », qui reposera beaucoup sur le secteur de la recherche et les terrains de l’alimentation, la consommation responsable, la santé, le logement… La vie quoi. Le président de la Côte-d’Or l’a annoncé : « Chacun de nos services aura un référent Futurs 21, chacun de nos cantons un centre de ressources ! »
Rendez-vous dans un an
Parmi les idées qui émergent, il en est une qui prévoit de créer les conditions d’une ceinture maraîchère autour de Dijon, alliant circuit court et proximité, réappropriation des sols et retour au grand jour d’une vieille tradition agricole locale. « Bienvenue ! » lance François Sauvadet à l’attention de François Rebsamen, lorsqu’un journaliste lui rappelle que le Grand Dijon a lui aussi ses projets maraichers.
La belle histoire reste donc à écrire. Elle ne nous dit pas encore si tous ces jolis sentiments resteront placés au-dessus des boules puantes qui agitent le monde politique dans un débat au ras des pâquerettes, mais son auteur est confiant : « On se donne rendez-vous dans un an ! » Autour d’une bonne potée, avec de grosses légumes toutes tendances confondues ? On en salive d’avance.