Pascal Thétard est comédien, metteur en scène et, depuis cette année, programmateur du festival Coup de Contes (19 septembre – 6 octobre) organisé par la médiathèque de Côte-d’Or. Ces histoires, traditionnelles ou pas, ont de l’avenir, il en est convaincu, y compris auprès des plus jeunes.
Par Patrice Bouillot
Pour DBM 77
Pascal aime raconter des histoires. Pas n’importe lesquelles, bien sûr. « Le conte, c’est le récit de choses impossibles qui surviennent dans des mondes merveilleux. Mais en fait, cela parle de nous, de la vie, de l’Homme, de la nature. Les contes, il en existe de tous temps et dans toutes les civilisations du monde. Ils nous touchent au plus profond de ce que nous sommes. » La rencontre de Pascal Thétard avec ce genre artistique qui se transmet de vive voix ne remonte pas à son enfance. « Petit, on ne m’a pas raconté d’histoires », se souvient-il. Est-ce pour cela qu’il a soif d’en dire, tant et tant ? C’est lors d’une visite en Alsace qu’il découvre le genre. « Cela m’a fait rêver, m’a touché, m’a perturbé. »
Devenu comédien, il écume les villages, les festivals, les écoles de sa région – la Champagne-Ardenne – et plus largement du Grand Est, pour perpétuer un art que d’aucuns jugent désuet ou condamnent à une disparition pure et simple. « Avant, nous allions davantage dans les écoles, et même dans les collèges et les lycées. Le public des enfants et des adolescents est captif. Il se passe quelque chose quand on partage des histoires fantastiques avec des jeunes, cela suscite des débats. » Ceux qui pensent que la nouvelle génération ne jure que par les écrans de leurs smartphones en seront pour leurs frais.
La poésie du quotidien
Et quand bien même. Pascal Thétard aime provoquer la rencontre impromptue. Il a pour habitude d’aller au-devant des gens pour leur faire toucher du doigt « le beau ». Le collectif qu’il a fondé à Reims en 1993, EutectiC, fédère cinq comédiens et une plasticienne qui n’ont pas peur de se produire hors des sentiers battus. « Nous travaillons l’oralité, souvent dans des endroits non-équipés, hors des salles conçues pour le spectacle. » Imaginez l’artiste, vêtu d’un bleu de travail – « car la poésie, c’est du boulot » –, déclamant de la poésie ou du Maupassant théâtralisé au milieu de la place du village, dans une salle polyvalente, dans un parc public. « Nous voulons toucher des gens qui ne vont pas au spectacle, démystifier l’accès à la culture, notamment en milieu rural, auprès des familles aussi avec leurs enfants, dans le quotidien et pas seulement à l’heure du soir où commence habituellement le spectacle au théâtre. » Une bonne dose de poésie injectée dans la vie des gens, voilà ce qui stimule toujours Pascal, 35 ans après.
Son premier Coup
Forcément, le concept de Coup de contes ne pouvait que lui plaire. Pascal connaissait déjà bien, et pour cause, il est apparu plusieurs fois dans la programmation de ce festival dont la grande particularité est qu’il se déroule en dehors de l’unité de lieu chère à nos auteurs classiques. « Cette année, nous nous produisons dans 16 espaces différents à travers tout le département de la Côte-d’Or, et notamment dans des endroits insolites comme le bord d’une rivière, puisque le thème de l’édition 2019 est l’eau. Il y aura aussi des balades dans la nature ponctuées de contes. » Le programme est signé de lui, pour la première fois : Francine Chevaldonné, qui lui a transmis le flambeau, a assuré la programmation pendant 26 ans, avec l’appui de la médiathèque de Côte-d’Or et des bibliothèques du réseau départemental. Personne n’y est pour rien, c’est l’air du temps, mais quand les différents rendez-vous de Coup de contes attiraient autrefois 100 ou 120 personnes, ils n’en attirent plus en moyenne que 80. La recette magique n’existe pas mais le conteur a la ferme intention de poursuivre dans la voie tracée par sa prédécesseure. « Mon travail, c’est de dénicher des talents. J’aime les voix rugueuses, les profils atypiques, des gens qui ont le contact facile et d’autres plus réservés. » Ils et elles sont sept cette année, qui nous promettent des récits de toute beauté. Il faudra se laisser aller, se laisser subjuguer par le pouvoir magique des mots, se laisser entraîner dans des récits traditionnels ou plus contemporains. Car dans notre monde un peu fou, dieu que le conte est bon.