L’histoire du Pré aux Clercs (180 ans) est intimement liée à celle de Françoise Colin (un siècle de moins). Cette institution dijonnaise, qui reçut en son temps l’archiduc Otto de Habsbourg, va donc fêter le double anniversaire sous la bienveillance du « duc » de la place, François Rebsamen en personne.
Il y a un siècle d’écart entre la naissance du Pré aux Clercs, le restaurant symbole de la place de la Libération de Dijon et celle de Françoise Colin qui, avec son mari, en a tenu les rênes pendant 30 ans. Aujourd’hui incarnée par Jean Pierre Billoux et son fils Alexis, la vie du Pré aux Clercs est intimement liée à celle de la famille Colin. Pas étonnant que Françoise ait souhaité y fêter ce soir son anniversaire: « C’est un symbole auquel je tenais. J’ai 80 ans depuis hier, l’année des 180 ans du restaurant. J’ai encore en mémoire mon 50ème anniversaire que j’avais fêté en même temps que les 150 ans de la maison ! Nous avions fait trois jours de fête. Inoubliable ! » L’événement est si retentissant que François Rebsamen en personne, traversera la place depuis le Palais des Ducs pour aider l’ancienne restauratrice à souffler les bougies…
Heureusement, elle en a vu d’autres, Françoise Colin. En trente ans de métier, du beau monde a défilé. Ses souvenirs, elle en a même fait un livre, Le client est roi, sorti il y a un an. « Ce restaurant, il est dans mon cœur, j’y ai vécu des moments étonnants, reçu des dizaines de personnalités. Celle qui m’a le plus marquée ? L’archiduc Otto de Habsbourg. » Et puis il a y aussi ce dîner à l’Elysée, à la droite du président Mitterrand, dont elle reparlera sans doute.
Victime de la nouvelle cuisine
L’histoire du Pré aux Clercs est une histoire d’amour et de plats gourmands : « mon mari, Henri, a repris l’établissement en 1938. Il était de 24 ans mon ainé. Après notre rencontre, je l’ai rejoint. » Nous sommes en 1958. Au restaurant, Françoise s’occupe de l’accueil, de la salle, des commandes: « nous étions spécialisés dans les plats en sauce. Il y avait la tourte de canard Henri Colin ou le jambon à la crème et aux morilles. Puis la nouvelle cuisine est arrivée dans les années 70. Ce n’était pas pour nous. Le Gault-Millau, par exemple, nous a descendus. Mais je ne leur en veux pas. Les plats en sauce, je continue de les faire. Pour moi. » A la mort de son mari en 1975, Françoise Colin décide en effet de poursuivre l’aventure. Elle restera à la tête du Pré aux Clercs jusqu’en mai 1987.
Ce Pré aux Clercs qui, justement, doit son nom à l’opéra-comique éponyme imaginé par Hérold, en 1832, et joué à Dijon. Un chef-dœuvre qui fit sensation et inspira le chef Orième pour baptiser son restaurant de la Place Saint Fiacre, à l’emplacement actuel du Saint Fiacre créé par Jean-Paul Durand. Ce n’est qu’en 1866 que le Pré aux Clercs a rejoint la place d’Armes. Dans ses archives, Françoise possède d’ailleurs un extrait de l’acte de vente. Une anecdote de plus à servir entre deux plats de réjouissance ce soir…