Pour une fois, lorsqu’on parle d’envol, il ne s’agit pas des prix. Petites histoires parallèles entre un chassagne-montrachet dégusté au pied de l’Everest et un autre chassagne-montrachet qui fait le bonheur des passagers d’une compagnie aérienne de Taïwan.
Grâce à James Cluer, l’un des 300 Master of wine dans le monde, nous savons désormais qu’un chassagne-montrachet est meilleur à boire dans nos caves que dans les airs à haute altitude. Ainsi que nous le rapportent nos excellents confrères de Bourgogne Live, on savait déjà qu’à « 35000 pieds, avec la pressurisation, il est plus difficile d’obtenir la même intensité dans les vins, en partie à cause de l’air sec. »
Pour en avoir le cœur net, pour prendre la mesure de cette relation improbable entre le ciel et le terroir, James Cluer, qui a de bonnes jambes et un grand souffle, s’est attaqué aux pentes qui conduisent à l’Everest, tire-bouchon et sherpa en main, pour déguster cinq belles bouteilles habituellement proposées en business class chez Qatar Airways. Si le champagne s’est mis à cracher comme un malade, le chassagne-montrachet de Marc Morey et fils avait quant à lui perdu de sa superbe. « La complexité habituelle des blancs bourguignons avait été mise en sourdine par la haute altitude », rapporte encore le site Bourgogne Live.
Un intéressant constat, qu’il a certes fallu chercher à la force du mollet, mais qui interpelle quand même. D’autant plus qu’un autre chassagne-montrachet, un « vieilles vignes » 2010 du joli domaine Vincent Girardin, déjà distingué de la sorte en 2012 pour son puligny premier cru Le champ grain 2007, brille dans le cadre des « Prix celliers du ciel ». Il permet à la compagnie taiwanaise Evergreen airlines, de recevoir une médaille d’or décernée par le magazine Business traveller.
Nous avons demandé à Jean-Pierre Nié, qui exploite notamment le domaine récompensé, ce qu’il pense de ce « chassagne paradox ». Grand voyageur devant l’Eternel et tout autant philosophe, découvrant du même coup la belle récompense qu’il venait de récolter, l’homme nous répond: « Je ne sais qu’une chose à propos du vin dans un vol, on supporte moins l’alcool en altitude. » Et le mystère reste entier.