En toute discrétion, il conçoit des packagings, décors ou boutiques pour les plus grandes marques de luxe. Plus localement, Benoit de Langalerie œuvre aussi dans le monde du vin. Ce gardien d’un artisanat nouveau prépare justement un déménagement pour le moins original à Nuits-Saint-Georges, cet été. À marquer d’une croix blanche.

C’est dans un immeuble dijonnais aussi discret que cossu, au dernier étage, avec vue imprenable sur la cité ducale, que Benoit de Langalerie a installé ses équipes depuis quelques années. Impregné de la culture artisanale asiatique, cet ébeniste de formation est revenu de Chine, où il a dirigé des manufactures et fondé une famille, pour créer Les Ateliers de Langalerie. Depuis 2017, ceux-ci travaillent aux packagings, vitrines et décors des plus grandes marques du luxe.
Quelques jolies réalisations locales sont aussi à leur crédit : la boutique du château du Clos de Vougeot, la miellerie d’Apidis à Dijon et de nombreux coffrets bois pour accueillir des flacons bourguignons de prestige.
Bureaux d’artistes à Nuits
C’est pour se rapprocher de cette clientèle que le dirigeant a décidé de déplacer ses locaux à Nuits-Saint-Georges, au 8 place du Cratère – « le 8 porte chance en Chine » –, juste en face de la mairie. Une belle demeure enjambant les XVIIIe et XIXe siècles, évidemment restaurée dans les règles de l’art par les meilleurs artisans du coin, va donc prendre vie d’ici le début de l’été.
Fier de la dimension familiale d’une entreprise dont le marché est mondial, Benoit de Langalerie entend restituer l’ambiance d’une vraie maison de famille pour sa dizaine de collaborateurs, designers, ingénieurs et personnel administratif. D’où un concept de bureaux assez particulier.
« Nous disposerons d’une cuisine, d’un salon, d’une salle à manger au rez-de-chaussée, et d’un jardin, pour y vivre comme à la maison. Nos bureaux seront à l’étage », explique le nouveau maître des lieux. L’art et l’amour du beau prendront une place toute naturelle. « Nous allons aussi accueillir des artistes dans deux petits appartements au dernier étage, qui pourront utiliser notre agence de création pour leur travail. Ils nous donneront un peu de leur essence, et passeront du temps avec nous. Ça va être sympa », se plait déjà l’entrepreneur.
De Chalon à la Chine
Si le siège des Ateliers de Langalerie s’installe à Nuits, l’entreprise compte d’autres implantations : un atelier de fabrication à Chalon-sur-Saône, une usine au Portugal et en Chine.
Au total, le petit groupe emploie 70 personnes, avec une volonté affirmée de se rapprocher de ses marchés principaux. Il travaille avec de nombreux sous-traitants, souvent très spécialisés. « Nous sommes des artisans d’art qui faisons un métier nouveau, au service de grandes maisons. Pour satisfaire un marché en perpétuel renouvellement créatif, il faut savoir s’entourer de spécialistes de différents métiers, un directeur financier, un marqueteur sur paille, un ingénieur qui va faire des plans de production pour un processus industriel, un sculpteur… », analyse ce grand perfectionniste, toujours en quête du détail.
Car si le concepteur se fait un nom dans le champ viticole, l’essentiel de son activité se déroule bien loin de nos vignes pour l’instant : « Le marché local pèse moins de 5% de notre chiffre d’affaires, que nous réalisons à parts égales entre États-Unis, Asie et Europe. Mais j’espère bien servir les acteurs de la région, c’est aussi le sens de ce nouvel espace d’accueil nuiton. »
Reliquaire du Vaucluse
L’entreprise a fidélisé certaines des plus grandes marques de luxe, dans l’horlogerie, la joaillerie et la maroquinerie. Mais chut. « Nous sommes souvent liés par des accords de confidentialité », explique sobrement Benoit, à l’aise dans cet exercice car plutôt adepte du « vivons heureux, vivons cachés ». Cette discrétion n’explique pas le succès de ces drôles d’Ateliers, qui tient à une puissante alchimie entre créativité, proximité avec les clients, et maitrise de vastes savoir-faire techniques, voire technologiques.
Les Ateliers de Langalerie travaillent le bois, le cuir, la soie, le ciment, le métal avec une précision d’horloger. Et d’autres matériaux plus étonnants, comme de la poudre d’huître, mise en forme à travers un procédé d’impression 3D. Les réalisations sont souvent exceptionnelles, et témoignent d’un soin extrême porté au détail.
Dans son bureau, un grand cube de verre frappé d’une croix attend d’être expédié. Sa façade est semi occultée par un motif à rayons, délimitant une croix transparente. « J’ai récemment été visiter l’abbaye cistercienne Notre-Dame de Sénanque, dans le Vaucluse. Les moines avaient besoin d’un reliquaire pour l’inauguration de leur restauration et j’ai souhaité le leur offrir. C’est un coffret en bois de chêne de Cîteaux, avec une marqueterie de paille de seigle récoltée à Tournus chez le dernier faiseur de France, ainsi que des charnières transparentes pour ajouter une touche de modernité », décrit-il, le plus simplement du monde. Au nom du saint esprit de l’artisanat !