Un colloque organisé la semaine dernière au Collège des Bernardins à Paris pose la problématique bourguignonne à l’échelle du monde: café, riz, argan et climats de Bourgogne ont des enjeux communs.
Par Dominique Bruillot
Photos Jean-Luc Petit et Michel Joly
Quel est le point commun entre les dernières forêts sauvages de café en Ethiopie, les plantations à parfum dans l’union des Comores, la mythique arganeraie au sud du maroc et les Climats de Bourgogne?
Durant trois journées à haute densité informative, les témoignages entendus dans le cadre du collège des Bernardins à Paris ont répondu partiellement à cette question en faisant le tour de la planète des terroirs d’exception. Avec une ambition affichée, considérer « la valeur patrimoniale des économies de terroir comme modèle de développement humain ».
L’intiative s’inscrit dans une étape fondamentale de la démarche qui devrait bientôt faire entrer les Climats de Bourgogne (les inspecteurs de l’Icomos sont sur le point leurs conclusions) dans le cercle fermé du patrimoine universel de l’Unesco. A ce stade des opérations, la Bourgogne doit donc prouver au monde entier que sa vision du développement durable a une résonnance que seuls les lieux et les produits d’exception sont en droit de revendiquer.
Durant trois jours, ce colloque ouvert par Aubert de Villaine et Erik Orsenna, deux parmi les grands pèlerins de la cause bourguignonne, a permis de « balayer » du regard la terre sous des angles aussi précis qu’emblématiques. « La problématique de la diversité des terroirs se situe au niveau de la planète, rappelle ainsi Jean-Pierre Gillot, membre actif du comité de soutien des climats, les témoignages des uns et des autres se recoupent de manière très significative. »
Une écologie propre au bien
En toile de fond de ces réflexions, l’identification. Une identification qui s’oppose de fait à la mondialisation car, dans les exemples traités, elle se fait sur le lieu et la récolte, avec des moyens qui lui sont propres, un savoir faire qui ne s’exporte pas. Cela vaut finalement aussi bien pour ce riz que l’on cultive dans les rizières en terrasses des Cordillères des Philippines que pour les grands crus bourguignons qui doivent leur spécificité à la précision micro-chirurgicale de la mosaïque des terroirs.
« Nous avons une mission forte, transmettre ces méthodes de culture aux générations suivantes », reprend Jean-Pierre Gillot, avec une pensée pour Bali, ce paradis architectural autour de l’eau « où tout est par terre aujourd’hui! »
« Il y a du patrimoine à protéger, à préserver d’un péril extérieur, de la modernité comme de la culture intensive, confie un autre participant au colloque, « on met ainsi en évidence une écologie propre au bien qui va être classé et, en la matière, la problématique des climats en Bourgogne a une résonnance avec des cultures aux Philippines et à Bali. »
Comme un permis de conduire
En investissant de la sorte le très symbolique Couvent des Bernardins, les Climats de Bourgogne ont joué la carte de l’exemplarité tout en restant fidèles à leurs racines spirituelles. Bientôt, tout le monde y croit fermement, la consécration suprème va tomber. Et ensuite?
« Ensuite, répond avec amusement notre témoin, « ce classement c’est comme le permis de conduire, il y aura un après classement comme il y a un après permis de conduire, il guidera notre manière de conduire le territoire avec de nouvelles règles du jeu. »
Juste retour des choses, une visite guidée in situ, sur la côte viticole, a prolongé le colloque. Pour une lecture en trois D, sur le terrain. Les heureux bénéficiaires de cette promenade pédagogique ont donc pu apprécier la dimension universelle des climats. Surtout quand l’un d’entre eux, à tout seigneur, tout honneur, se nomme… Romanée Conti.