Maires ruraux : la Côte-d’Or et sa « boîte à outils » territoriale

Routes, fibre optique, usages numériques et Plan Marshall : la Côte-d’Or a développé une formidable boîte à outils au service des communes et des équilibres territoriaux. François Sauvadet en a fait son cheval de bataille. Le 21 qui se veut exemplaire et durable, a aussi placé au sommet de ses priorités le plus sensible des sujets : l’eau.

L’un préside le Conseil départemental et l’assemblée des Départements de France, l’autre représente les maires ruraux : François Sauvadet et Bruno Bethenod, ici sous le clocher de Meursault, veillent à une relation constructive, conscients que le socle de la France se joue ici. © Michel Joly / DBM

Depuis qu’il a succédé à Dominique Bussereau à la présidence de l’assemblée des Départements de France, l’ancien ministre François Sauvadet s’est offert une puissante tribune pour la Côte-d’Or. Une belle position qui oblige à l’exemplarité. 

Tant mieux. Car dans son département, une batterie de mesures a été mise en place pour donner à la ruralité et aux communes qui la composent, d’efficaces outils de progression. Un plan Marshall (lire encadré ci-dessous), lancé au lendemain du Covid, met 150 millions d’euros sur la table sur cinq ans, pour accompagner déjà des milliers de projets. Un effet de levier redoutable, qui parvient à mobiliser les maires dans leurs investissements.

56 millions de m3/an

Ces derniers ont d’autres besoins. Par exemple, une approche technique pour mieux maîtriser leur voirie. La MiCA (Mission conseil et assistance des collectivités) leur envoie alors un conseil, c’est son rôle. Côté numérique, l’implantation de la fibre arrive à son terme, au prix d’un chantier pharaonique alors que la population, âgée surtout, est progressivement acculturée à l’usage du web et des ordinateurs grâce à des conseillers qui parcourent tout le département en s’appuyant sur un réseau de plus d’une cinquantaine de lieux d’apprentissage.

Pour que ça marche, le Département met ce qu’il faut en face. C’est encore le cas pour le grand dossier de notre époque, l’eau. Le Plan départemental de l’eau (PDE), lancé en 2019, prétend « garantir à tous les acteurs un accès à l’eau pérenne ». Un état des lieux estime à plus de 56 millions de mètres cubes les besoins en eau, tous usages confondus (eau potable, agriculture, industrie) de la Côte-d’Or.

Marshall, plan historique

Historique. En 2022, au lendemain de la crise sanitaire, le Département de la Côte-d’Or débloque 150 millions d’euros sur la période 2023-2027, en soutien aux investissements des communes et des groupements de communes et au renforcement de l’attractivité des territoires. Le bien nommé Plan Marshall agit sur de nombreux terrains : voirie communale, transition écologique, numérique, patrimoine protégé, etc. Les équipements publics communaux sont inclus : dans le cadre de l’opération « Village Côte-d’Or », Villey-sur-Tille, 300 habitants, a par exemple reçu 5 000 euros pour accompagner la création d’un bureau dédié à l’accueil des citoyens et l’achat d’une rampe pour les personnes à mobilité réduite. Le service dédié cartonne. « Nous traitons un millier de dossiers par an », rapporte Catherine Chevillard, du pôle Aménagement et développement durable des territoires. « La démarche est des plus simples : il suffit de déposer un dossier dématérialisé qui sera instruit et soumis au vote de l’assemblée départementale. » Souple, le Plan Marshall prévoit une bonification des aides pour les communes pauvres en recettes réelles de fonctionnement et un coup de pouce aux entreprises locales.

Ces besoins augmenteront de 1 % à plus de 7 % selon les scénarios envisagés, à l’horizon 2050. « Il faut à tout prix éviter une guerre de l’eau, nous avons le soutien des associations des Maires et des Maires ruraux pour mieux organiser la production d’eau potable », tranche François Sauvadet, dont la collectivité consacre près de 2 millions d’euros aux études et aux travaux de création d’unité de production, de traitement ou d’interconnexion.

Pour cela, 18 « ressources d’intérêt départemental 6 » ont été identifiées, dont deux sites bien connus du grand public, le réservoir de Grosbois-en-Montagne et la Boucle des Maillys. À la demande des communes, des EPCI et des syndicats, une révision du Schéma départemental de coopération intercommunal a été engagé pour s’organiser à une autre échelle, avec l’accompagnement du Département qui demeure le premier partenaire de proximité avec l’État. Deux nouveaux syndicats mixtes seront en lien avec les ressources de Grosbois et des Maillys. Maintenant, les questions se posent : comment améliorer la sobriété des usages de l’eau, protéger les ressources actuelles, sécuriser leur accès et en identifier de nouvelles, voire les interconnecter ?

Fibre optique : le chantier du siècle

Sept ans de travaux et un investissement de 130 millions d’euros auront permis à la Côte-d’Or de réaliser ce que François Sauvadet a lui-même qualifié de « chantier du siècle ». Le déploiement de la fibre arrive à son terme, soutenu par l’Europe, l’État et la Région. « Une opération de solidarité territoriale, car le Département n’a pas demandé de participation aux communes ni aux comcom », précise François Sauvadet. Un chantier mixte privé/public aussi : Orange et Altitude Infra sont chargés d’une partie du déploiement, notamment autour des grandes agglomérations. Le Département assume le reste. Soit 80 000 pas de portes répartis dans 405 communes, rurales pour la plupart. C’était dans le cahier des charges, « pas question de laisser certains territoires sur le bord de la route ». L’enjeu est déjà économique. La fibre optique facilite l’installation des entreprises « sur un territoire très étendu ». Puis démographique, car « un jeune couple qui désire s’installer y sera très attentif ; l’e-tourisme, l’e-santé et le télétravail seront pour lui des arguments très forts ». Pour tout savoir, tester son éligibilité et connaître son « débit max » : thd.cotedor.fr.

© CD21

Nouveau plan de l’eau

Un nouveau plan « Côte-d’Or Eau 2050 » a donc été adopté en juin 2023. Il se décline notamment en 21 fiches actions autour de cinq axes stratégiques : « Favoriser une gestion équilibrée de l’eau et des milieux, soutenir les territoires dans leur résilience face au changement climatique, améliorer et partager la connaissance, promouvoir une plus grande sobriété des usages de l’eau, accompagner les politiques de gouvernance de l’eau. »

Organisées par usages de l’eau (en milieu naturel, eau potable et assainissement, agriculture, activités économiques, voies navigables), ces actions amélioreront « la connaissance et la gestion de l’eau à l’échelle du territoire, grâce à de nombreuses études et la mise en place d’un Observatoire départemental de l’eau. »

Les communautés de communes, dont c’est désormais la compétence, sont les premières concernées. Mais ne jamais oublier que d’un point de vue administratif, c’est le maire qui est responsable de l’approvisionnement en eau potable de ses administrés. Une fois encore, sur ce point, le Département agit en partenaire responsable. Limpide.

Numérique et bons usages

En Côte-d’Or, comme partout, un habitant sur trois est en fragilité numérique. Le déploiement de la fibre s’achève, une mise à niveau des usages s’impose. 7 conseillers numériques animent un réseau de 30 Espaces Numériques et 26 France Services. Les premiers sont des lieux d’apprentissage. Chacun peut y apprendre à créer sa boîte mail ou faire des achats en ligne. Les seconds accompagnent l’administré dans ses démarches administratives en ligne. « Certains territoires de la Côte-d’Or ne sont pas desservis, nous avons donc imaginé une équipe itinérante », rapporte Maxime Jobard, directeur des projets Usages numériques. Cette équipe est à la disposition des maires de Côte-d’Or, que « nous accompagnons dans la mise en place de questionnaires, réunions publiques et la création de programmes de formation de leurs administrés ».

Le périmètre d’action est vaste : jeux sur la cybersécurité, casques de réalité virtuelle, broderie numérique, etc.
Les seniors sont les premiers ciblés. Au-delà de l’amélioration de leurs pratiques numériques, ils voient dans ces ateliers gratuits, un nouveau lien social. Les communes n’ont qu’à solliciter le service mais « certains élus n’osent pas venir vers nous, c’est dommage ». À bon entendeur !

Routes : conseil providentiel

La Côte-d’Or est le quatrième département le plus étendu de France. 230 agents de terrain sont rattachés à l’un des 32 services techniques (ou centres de matériels) répartis sur le territoire et entretiennent 5 710 km de routes départementales. « Ils assurent une action homogène sur l’ensemble du département », témoigne Didier Laye, directeur des Services techniques territorialisés. Ce dispositif est centralisé et visualisé en temps réel depuis le Centre d’ingénierie et de gestion du trafic (CIGT) basé à Dijon. Les données remontent ici en permanence et les équipes sont mobilisables H24 et 7j/7. « La seule force de frappe capable d’agir ainsi, alors que face au dérèglement climatique les urgences se multiplient. »

Le Conseil départemental soutient directement les mairies et les structures intercommunales. Grâce à la MiCA (Mission conseil et assistance aux collectivités) elles disposent de conseillers en ingénierie et de spécialistes qui les accompagnent dans leurs projets de voirie. Un maire veut repenser la circulation dans sa commune, rénover la couche de roulement d’une voie, aménager des places de stationnement ? MiCA fournit les éléments de réponses : pertinence de sa réflexion, chiffrage du projet, calcul des aides… 

© Philippe Bruchot/CD21