C’est un établissement scolaire pas tout à fait comme les autres, une véritable institution. L’Ecole maîtrisienne régionale de Dijon, plus connue sous le nom de Maîtrise de Dijon, ensemble choral d’élite, nous chante (et nous explique) Noël.
Cela fait déjà bien longtemps que la Maîtrise de Dijon a fait de l’enseignement du chant choral de haut niveau sa spécialité. Aujourd’hui gérée par le groupe Saint-Bénigne, elle a été installée à Dijon en 1895 par Monseigneur Moissenet. Les écoliers et les collégiens scolarisés disposent d’horaires de cours aménagés afin de pouvoir pratiquer le chant. De la chorale à haute dose pour ces jeunes Dijonnais et plus largement côte-d’oriens (la côte viticole y envoie volontiers ses enfants) sur lesquels veille Etienne Meyer. Le chef de chœur en profite pour évoquer l’élargissement du registre de ses protégés : « Il y a encore 30 ans, le chœur avait pour seule vocation l’accompagnement des messes et des vêpres à Saint-Bénigne. Aujourd’hui, si nous continuons d’être au service de la liturgie, nous développons aussi tout un programme de concerts qui permet d’ouvrir le champ de découvertes des élèves. »
Et voilà comment dans les années 90, Alain Chabert a décidé d’explorer le vaste domaine des chants de Noël. Les concerts de fin d’année de la maîtrise sont désormais très courus, comme en atteste une nouvelle fois le succès des représentations données la semaine dernière à Dijon. « Le chant de Noël est quelque chose d’universel, d’intergénérationnel, enchaîne Etienne Meyer. Cela fait pleinement partie de la magie, de l’ambiance de Noël, dans tous les pays. Je pense notamment à ces maîtrises anglaises qui effectuent un travail considérable autour de ce répertoire. »
L’héritage de Samson
S’ils ne s’interdisent pas d’entonner parfois le très « moderne » Petit Papa Noël, les 80 collégiens qui forment le chœur principal de la Maîtrise travaillent essentiellement sur le répertoire traditionnel : « La naissance de Jésus a une place importante dans les textes, associée à des thèmes plus locaux. Et à ce petit jeu, la Bourgogne est un terrain d’expérimentation privilégié. Nous avons la chance que beaucoup de noëls bourguignons ont été harmonisés par Joseph Samson (ndlr : directeur de la Maîtrise jusqu’en 1957, à qui l’on doit aussi l’harmonisation de nombreux chants populaires bourguignons). Ce qu’il nous a apporté est considérable. Son héritage est d’une richesse inestimable. » Un répertoire dont une grande partie provient du début du XVIIe siècle, époque coïncidant avec l’apparition des partitions. Avec des chants du terroir, dont les thèmes sont souvent populaires, à l’image de tous ces noëls en patois bourguignon écrits par le poète dijonnais Bernard de La Monnoye, auteur du célèbre Guillô, pran to tamborin. Mais les jeunes chanteurs de la Maîtrise aiment aussi les voyages. Cette année, c’est le Noël allemand qui a constitué le fil rouge de leur travail. Etienne Meyer l’annonce déjà, l’an prochain, il devrait revenir en France, sans doute même en Bourgogne, tant le répertoire est immense, et sa découverte indispensable à la culture des jeunes élèves de la Maîtrise.
Mais ici comme ailleurs, n’allez pas croire que la vie est un long fleuve tranquille. A la marge du beau parcours de ses petits chanteurs, la Maîtrise vit sa petite révolution intérieure. Un projet de déménagement qui passe par la revente des locaux historiques, situés à deux pas de Saint-Bénigne, divise les parents. En attendant l’issue de ce dossier qui, personne n’en doute, se fera dans l’apaisement, ce Noël s’annonce encore une fois enchanteur.