Arleuf, 650 mètres d’altitude. Un petit air de montagne qui sied à merveille au jambon du Morvan. C’est là que le produit puise, depuis des décennies, son goût si particulier. C’est là aussi que des professionnels veulent célébrer son renouveau. Arnaud Sabatier, gérant de Fernand Dussert, est le premier de cordée.
Par Michel Giraud pour Bourgogne Magazine
Photo : Jean-Luc Petit
Longtemps le jambon du Morvan a lié son destin à celui d’un homme: Fernand Dussert. Lorsque, dans les années 1940, il succède à son père à la tête de la charcuterie familiale, c’est lui qui décide de franchir le pas d’une production industrielle des salaisons. Devenu plus tard maire d’Arleuf, puis sénateur de la Nièvre, c’est encore lui qui assure, grâce à son réseau parisien, la renommée du jambon du Morvan. Nous sommes alors dans les années 1960-1970.
Aujourd’hui, les choses ont bien changé. En 2004, Arnaud Sabatier a racheté la société Fernand Dussert, et il dresse un tableau assez noir de la situation: « On a clairement perdu la notoriété du jambon du Morvan. Y compris sur notre territoire, et c’est sans doute ce qui me dérange le plus. Il y a une trentaine d’années, il était partout, dans les charcuteries artisanales, dans les restaurants et les fermes-auberges morvandelles…Aujourd’hui, certains établissements ne l’ont même plus à la carte. »
Le chef d’entreprise, fervent défenseur du terroir, a donc décidé de prendre son bâton de pèlerin et de relancer la machine. « Nous avons un savoir-faire indéniable dans le Morvan. Ces jambons que l’on frotte à la main avec du gros sel préalablement associé à un mélange d’épices, de vin rouge; ce goût inimitable que confèrent au produit les séchoirs installés au milieu des sapins. »
Profitant de son expérience quasi centenaire et de son réseau, la société Fernand Dussert veut aujourd’hui être le moteur du renouveau: « On réfléchit avec les éleveurs, les marchands de viande, les restaurateurs, les charcutiers. Il faut que l’on trouve un moyen de remettre le jambon du Morvan sur le devant de la scène. Le label existe, mais son image est à reconstruire. Déjà, il faut absolument que les touristes qui viennent sur notre territoire comprennent que c’est un produit emblématique, héritier d’une tradition transmise de génération en génération. Les jambons ont toujours séché aux poutres des fermes morvandelles. Il faut donc en premier lieu que le produit retrouve toute sa place sur les tables locales, qu’il soit partout. Après quoi, nous élargirons notre champ d’action. »
Tous derrière le jambon du Morvan!
Arnaud Sabatier croit aux potentialités du jambon du Morvan: « »En 2013, nous avons remporté une médaille d’or au Concours général agricole, preuve que la qualité du produit est là. Nous avons tous quelque chose à gagner dans l’affaire, des producteurs de porcs de la région aux transformateurs. Nous voulons être le chef de file de cette renaissance qui profitera à tous. Mais nous ne pouvons le faire seuls. A Arleuf, une association est en cours de création. Nous lançons un appel aux professionnels, aux acteurs de la filière, ainsi qu’aux consommateurs avertis et aux passionnés du produit. Qu’ils nous rejoignent pour mener avec nous cette opération de reconquête. Qu’ils se fassent connaître auprès de la mairie. On a besoin de tout le monde! »
La démarche a déjà reçu le soutien de la fondation Morvan, terre de vie en Bourgogne. Et ce n’est sans doute qu’un début.