Le plus ancien café de Bourgogne va changer de main. Après 21 ans à la tête du Café Parisien à Saulieu, Jean-Marc Tingaud raccroche. Le week-end dernier, il organisait un vide-café festif, le moment choisi pour partager ses sentiments.
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Le capitaine du plus ancien café de Bourgogne va bientôt quitter la barre. Derrière le comptoir qui ne sera bientôt plus le sien, Jean-Marc Tingaud sourit. À 77 ans, le Morvandiau s’apprête à transmettre le navire. « Gosse, je passais devant tous les jours quand j’allais à l’école de Saulieu. Je cherchais la moindre ouverture à travers les vitres sablées pour passer un œil et regarder ce qui se passait dedans. À l’époque, il était fermé pour travaux. J’avais à peine 6 ans, c’était mon château de la Belle au Bois Dormant ! »
Minot, il était loin d’imaginer qu’il en deviendrait le propriétaire en avril 2004. Pendant 21 ans, ce photographe a fait perdurer une histoire commencée en 1832, faisant du Café Parisien un membre éminent du réseau des Cafés historiques et patrimoniaux d’Europe. « Le temps passe et mes activités de photographe me transportent encore à travers le monde. Je fais sans cesse l’essuie-glace entre Paris et le Morvan. C’est un métier très dur, il y a les responsabilités, l’équipe à gérer, le restaurant que j’ai créé, un café qui petit à petit prenait de l’ampleur… »
De la Com’ au Café Parisien
Cette transmission est dans les tuyaux depuis trois ans, lorsque Nathalie et Joanick Lombard, anciens gérants de la brasserie La Comédie à Dijon, ont pris un petit noir au comptoir du Café Parisien : « IIs sont tombés amoureux du Morvan et du bistrot, assurent Jean-Marc et Juliane Tingaud. Ils nous ont demandé si nous étions vendeur une première fois, puis une deuxième… Nous nous apprécions beaucoup, c’était essentiel. »
La passation officielle aura lieu samedi 15 février, jour de réouverture du Café Parisien après quelques semaines d’hibernation. Pour la première fois depuis 21 ans, le taulier du plus vieux café bourguignon passera de l’autre côté du zinc. Les habitués ont été conviés à un moment festif à partir de 19h. Le week-end dernier, pour sa « der », le photographe a organisé un vide-café. Histoire de permettre aux clients de garder un morceau du Café Parisien chez eux. Une carafe par-ci, une affiche par-là…
« J’ai adoré l’Arche de Noé que le Café Parisien est devenu »
Accoudé à l’une des tables massives qu’il a chéri deux décennies durant, dont chacune porte le nom de personnages inspirants (Jean Genet, Bernard Loiseau, etc), le bistrotier replonge dans ses souvenirs. « J’ai rencontré des gens qui sont devenus des amis. Je pense à ce couple d’Italiens qui revient chaque année depuis Côme, dont on a fait la connaissance des enfants, que l’on a vu grandir ! J’ai aimé la mixité sociale, j’ai adoré l’Arche de Noé que le Café Parisien est devenu. Il a véhiculé des valeurs qui m’étaient chères. »
Ici, l’artiste a organisé des concerts, expositions et autres conférences mémorables. « Je me souviens de ces musiciens gnaouas du sud du Maroc que j’ai rencontrés à Paris et qui sont venus se produire ici à plusieurs reprises. À chaque fois que l’on programmait des artistes, ce n’était pas un one shot dans un programme culturel, on avait toujours l’ambition de nouer des liens forts avec eux. » Ce foisonnement culturel devrait perdurer, Nathalie et Joanick y apporteront leur patte. Juliane et Jean-Marc ne seront jamais bien loin : « J’aurai toujours de la terre du Morvan sous mes chaussures. Des projets se mettent en place, on avance, et je reviendrai de temps en temps… » Désormais, ce sera de l’autre côté du comptoir.