Elle est l’une des dernières étapes en solitaire de la Saône qui, un peu plus loin, à Verdun-sur-le-Doubs, reçoit les eaux du Doubs. Mais Seurre est aussi une cité étonnante qui affiche sa fierté de compter la bienheureuse Anne-Marie Javouhey parmi ses enfants, alors qu’à une poignée de kilomètres, Bagnot joue avec le diable sur les murs de son église. Une rubrique VRP (une Ville, une Route, un Patrimoine) qui ne manque pas de contrastes.
Par Michel Giraud
Rubrique réalisée avec le concours de l’entreprise Rougeot à Meursault
« Ici, le 10 juin 1944, furent lâchement assassinés ces braves FFI, Terriot Julien (18 ans), Petiot André (23 ans), Boudier Maxime (23 ans), Lanu Georges (19 ans). » La mémoire collective prend parfois racine au milieu des champs, avec un monument presque anodin, dont la croix de Lorraine immortalise pourtant une page noire encore vive localement de l’histoire de France. Insensible, la D973 qui relie Beaune à Seurre déroule son long bandeau de bitume très roulant à cet endroit et assure la jonction entre Saône-et-Loire et Côte-d’Or. Le Jura n’est pas loin non plus. Destination Seurre maintenant.
Anne-Marie, libératrice des esclaves
Dès l’entrée du bourg, c’est un panneau qui rappelle le lien entre la ville et Anne-Marie Javouhey, « libératrice des esclaves en Guyane ». Née en 1779, dans la commune voisine de Chamblanc, elle est aussi la fondatrice de la congrégation des sœurs de Saint-Joseph de Cluny. Dans la première moitié du XIXème siècle, ces religieuses sont envoyées au Sénégal, en Martinique, en Guinée et en Guadeloupe pour y créer écoles et hôpitaux. La Guyane fixe le destin d’Anne-Marie Javouhey. Accompagnée de dizaines de missionnaires, elle recueille des centaines d’esclaves qu’elle accompagnera, éduquera et émancipera. A Chamblanc, une forêt mémorielle a été érigée à la mémoire des 185 esclaves noirs de Mana (Guyane) affranchis par la bienheureuse. Un sentier de randonnée (16,7 km) porte aussi le nom de la religieuse seurroise, au départ du port de plaisance de Seurre.
Suivez le Jacquemart
Depuis le pont du port fluvial, l’imposant ouvrage de l’écluse à grand gabarit (185 m de long, 12 m de large) impressionne. Il est lui-même dominé par une tour de contrôle ouverte à la curiosité de chacun, dès qu’un éclusier est dans les parages.
Le centre du village est là, tout près. L’office de tourisme marque le départ du parcours Jacquemart, ainsi baptisé en référence au sonneur de cloche installé depuis 1872 au-dessus de l’horloge de l’école primaire de la rue Sainte-Claire. 12 panneaux de présentation des bâtiments ou lieux remarquables de la ville rythment une balade agrémentée de questions ludiques et d’énigmes pour les enfants.
Qui sait, par exemple, que la maison Bossuet appartenait aux ancêtres du célèbre évêque et écrivain français? Une visite conseillée, d’autant qu’elle implique celle du musée de la Saône et des gens de la Saône installé dans ses combles. Géologie et archéologie de la rivière, histoire de la batellerie fluviale: ces thèmes intimement associés à la nature de Seurre ne seraient pas mieux traités ailleurs.
L’escale seurroise peut donc combler les amateurs de patrimoine. Elle peut aussi surprendre qui est en quête d’insolite. En la prolongeant notamment en direction de Nuits-Saint-Georges, par un arrêt à Bagnot. Les fresques qui décorent la voûte et les murs de l’église du village constituent un ensemble unique de peintures murales du XVème siècle. On y évoque l’inépuisable thème du Jugement dernier. Il y est même question du diable! Comme quoi, en quelques kilomètres on peut passer sans la bénédiction de qui que ce soit d’un extrême à un autre.