Le refuge de Jouvence à Messigny-et-Vantoux (SPA) et la Confédération nationale Défense de l’Animal ont beaucoup à apprendre à un maire. Déjà qu’il est le chef des chiens et des chats errants dans sa commune. Et que des outils sont à sa disposition.
Le maire est « maître » des chats et des chiens errants de son territoire. Le Code rural (L.211-19-1 et autres) rappelle en tout cas qu’il en est l’autorité compétente : « Il est interdit de laisser divaguer sur la voie publique les animaux domestiques comme les animaux sauvages apprivoisés. »
L’élu a quelques outils en main pour cela. Il peut prendre un arrêté, enjoindre les propriétaires de tenir toutou en laisse, les prévenir qu’une errance constatée peut conduire à la fourrière, que nourrir une tribu entière de chats errants est passible d’une amende, que les cacas doivent être ramassés… Il est même en droit, à sa demande ou à celle d’une association de protection, de procéder à la capture de chats non identifiés, sans maître apparent, réunis en groupe dans un lieu public, pour les stériliser et les identifier avant de les relâcher à l’endroit même où ils ont été capturés.
Halte à la divagation
La divagation est un fléau. Les communes doivent disposer d’une fourrière adaptée, in situ ou voisine, et informer la population des modalités de prise en charge de cette dernière. Elles peuvent passer des conventions avec des cabinets vétérinaires et des refuges. Car au-delà de 8 jours sous bonne garde, si personne n’est venu le chercher, notre ami vagabond est considéré comme abandonné.
Et là, soit on le garde en fourrière tant que se faire se peut, soit on le cède gratuitement à un refuge après avis favorable du vétérinaire, soit on envisage le pire. Tel n’est pas le but, tout sera fait pour éviter l’euthanasie.
Sylvie et Capucine
Sylvie Boillot et Capucine Chanliaux vont développer ces informations dans le village partenaires du Congrès national des Maires Ruraux de France, fin septembre. La première préside le refuge de Jouvence à Messigny-et-Vantoux, au nord de Dijon, la deuxième est la compagne du maire de Belleneuve en Côte-d’Or, vice-président de l’AMR21.
Les deux partagent une passion commune pour le bien-être animal, sans pour autant tomber dans l’angélisme, avec l’idée que bien communiquer assure déjà une bonne approche de la problématique.
La reproduction exponentielle des félins apporte il est vrai un gros élément de réflexion. En quatre ans, un couple de chats peut générer une descendance de… 20 000 greffiers ! Face à cette performance olympique, la stérilisation est la solution.
Sylvie Boillot, administratrice de la Confédération nationale Défense de l’Animal (CNDA), est insatiable sur le sujet : « Le maire n’est obligé de rien en réalité, un juriste de la CNDA sera là pour l’éclairer. La stérilisation est non seulement une possibilité qui anticipe une prolifération parfois catastrophique, elle lutte contre les maladies comme le sida du chat, elle évite les bagarres, elle enraye les odeurs d’urine et stabilise les populations animales. »
Commune et SPA, en duo
Jouvence est un refuge indépendant, l’un des 270 adhérents de la confédération nationale. Une douzaine de personnes, dont deux vétérinaires à temps partiel, y travaillent. Les membres du conseil d’administration sont des bénévoles. « Un refuge, c’est président-dépendant », résume habilement Sylvie qui, après une carrière dans l’industrie pharmaceutique, a décidé de se consacrer pleinement à sa mission.
Sa passion se retrouve dans l’état impeccable des boxes et l’engagement des collaborateurs. Sylvie a le don précieux de savoir apaiser certaines bêtes blessées par la vie, ces chiens que l’on dit dangereux. « Je veux qu’ils soient bienheureux, bien traités médicalement », pose-t-elle.
Au moment de notre visite, 103 chiens et 83 chats sont au refuge. Certains, dont les maitres sont sous les écrous, ont été confiés par la justice. D’autres sont des « chiens Covid » : ceux qu’on est allé chercher pendant la crise sanitaire parce qu’ils délivraient un bon de sortie pour des balades, mais qu’on a vite rendu dès que la vie a repris son cours normal.
Tout cela a bien évidemment un coût. Le refuge de Messigny-et-Vantoux représente un budget annuel de l’ordre de 500 000 euros, principalement issu de dons et de legs. La relation avec les notaires est donc déterminante. « On fait des opérations croquettes », s’amuse Sylvie qui, régulièrement, se retrouve confrontée à des tensions financières.
L’une des ressources du refuge vient aussi des conventions passées avec les communes. 122 d’entre elles ont signé avec Messigny, à des tarifs étudiés : 50 centimes par habitant, 40 euros pour une castration de chat, 55 pour une stérilisation de chatte. Ce qui permet aussi au refuge de répondre à des attentes particulières. « Récemment, Selongey nous a appelés pour récupérer trois bergers allemands abandonnés sur le bord de la route. Étant conventionnés avec la commune, nous sommes intervenus », témoigne la présidente.
Ces interventions, quelques fois, peuvent offrir un spectacle affligeant. Dans un village de l’agglomération, il a fallu récupérer en catastrophe de nombreux chats et chiens, dans un état lamentable, au milieu des détritus. Leur « gardienne » souffrait des syndromes de Noé et de Diogène.
Quelques animaux, assez peu en réalité, n’ont pas survécu, les autres ont tous été replacés grâce à la diligence et au travail remarquable de Jouvence. Cette histoire triste a donc trouvé une issue digne. Elle rappelle à chacun d’entre nous l’importance de nos animaux, partie intégrante de la famille, et de leurs protecteurs, qui s’en occupent avec autant d’amour et de soin. Ne l’oublions pas.