Le château du Clos de Vougeot accueillera, le 17 septembre et pour un an, une exposition-événement en hommage à l’architecte né à Dijon. « Gustave Eiffel, une enfance en Bourgogne » capte la source d’une trajectoire hors du commun et montre de quel métal était fait l’ingénieur disparu il y a cent ans.
Avant d’ériger un petit monument au bord de la Seine, Gustave Eiffel (1832-1923) a vécu de nombreux moments d’intimité avec la Côte-d’Or. On le sait notamment grâce à sa correspondance continue avec sa mère Mélanie, une des premières grandes femmes d’affaires de l’époque, qui l’avait confié très tôt en pension pour gérer une prospérante entreprise de négoce sur le port de Dijon.
C’est cette existence peu connue du grand public, de la naissance aux prémices de son métier d’ingénieur, que propose d’aborder l’exposition, principalement grâce à des archives issues du musée d’Orsay. Dix-sept panneaux rassemblent le puzzle d’une saga familiale passionnante, qui n’en finit plus de s’étirer. « Les années passées en Côte-d’Or ont été les plus importantes pour Gustave Eiffel, celles où il s’est construit. Il fallait donc mettre en lumière cette période, heureuse et dense, à Dijon, à Gilly ou dans un lieu tel que le Clos de Vougeot », témoigne Véronique Brunet. La commissaire de l’exposition connait le sujet par cœur pour avoir écrit plusieurs ouvrages eiffeliens, dont le premier se concentre justement sur la jeunesse de l’architecte.
Visite VIP à Vougeot
Cette jeunesse passe notamment par Gilly-lès-Cîteaux, chez tante Viard, dont l’époux est vigneron. Gustave y passe de nombreuses vacances, il s’amuse, conçoit des objets, fabrique des petits moulins, des autels dans le jardin… Il aime aussi vendanger, faire du vin avec sa cousine Alice, qu’il adore. C’est à Gilly aussi qu’il rencontre un personnage marquant, Gabriel Ouvrard. Ancien banquier de Napoléon, ce notable a fait l’acquisition du Clos Vougeot en 1818, non content d’avoir dans le giron familial le château voisin de Gilly et quelques parcelles de vignes nommées Romanée-Conti et Chambertin.
En septembre 1842, il fait donc découvrir sa propriété au tout jeune Gustave Eiffel, alors âgé de dix ans. Dans l’une de ses longues correspondances maternelles, le petit veinard raconte : « Ma chère maman, (…) j’ai une grande nouvelle à t’annoncer. Monsieur Ouvrard père est venu me prendre chez ma tante Viard et il m’a emmené voir le clos. J’ai déjeuné avec lui. Il m’a montré comment se faisait le vin. Il m’en a fait boire beaucoup. Il m’a montré tous les appartements du Clos de Vougeot et je les ai trouvés bien beaux, surtout leurs plafonds. »
Avec l’arrière-arrière-petit-fils
« Gabriel Ouvrard avait détecté dans le tout jeune Gustave un petit garçon à qui on pouvait parler de choses sérieuses », commente avec tendresse Sylvain Yeatman-Eiffel, son arrière-arrière-petit-fils (lire encadré page précédente). Dans le cadre de l’exposition, le château du Clos de Vougeot a commandé à l’artiste-peintre un tableau « qui ferait la liaison entre Gustave et ce lieu emblématique de la Bourgogne viticole. J’ai donc choisi le thème d’un bistrot, avec le fameux grand cru posé sur le guéridon et la tour colorée façon Dufy ». Le résultat est visible sur l’affiche de l’événement. Sylvain Yeatman-Eiffel est particulièrement soigneux de l’histoire familiale. Il se fera un plaisir d’inaugurer en personne l’expo, mi-septembre, quittant sa belle île grecque de Cythère, où il vit une partie de l’année et « retape avec acharnement une maison depuis vingt-quatre ans ». N’est pas ingénieur qui veut !
Un Eiffel peut en cacher d’autres
En l’espace de dix ans, Gustave Eiffel a eu cinq enfants : Claire, Laure, Edouard, Valentine et Albert. Au fil des branches, on compte aujourd’hui 70 descendants toujours de ce monde, recensés très sérieusement par l’Association des descendants de Gustave Eiffel. Sylvain Yeatman-Eiffel en est le président d’honneur et membre actif. Son arrière-grand-mère du côté maternel était Claire Eiffel. L’arrière-arrière-petit-fils du génial architecte se définit avant toute chose comme un peintre épicurien.
Depuis les années 70, il a signé environ 600 œuvres et expose régulièrement à Paris, Venise et en Grèce, les trois endroits de sa vie. La tour familiale fait naturellement partie de son œuvre. Il l’a représentée une soixantaine de fois, notamment à travers une série de variations où la dame de fer se retrouvait diffractée, ondulée, morcelée, « kaléïdoscopée » comme il le dit. Comme un hommage aux 36 vues d’Henri Rivière et au style pop de Robert Delaunay. « La tour fait partie de notre existence. Mon grand-père en était le président, j’ai passé tous mes anniversaires d’enfant au premier étage, ma sœur y a fait son bal des 18 ans, mon fils y a demandé la main de sa Japonaise… »
Son fils Savin, talentueux réalisateur, a justement écrit et co-réalisé un 90 minutes pour Arte, prévu à l’été 2023. Grâce à des reconstitutions 3D, des sources officielles (procès-verbaux d’auditions, lettres, croquis…) et des archives intimes, La guerre des tours revient sur la genèse de ce projet fou et la concurrence entre Gustave Eiffel et le projet granitique de Jules Bourdais. Tout bonnement passionnant.
Eiffel, une enfance en Bourgogne
À partir du 17 septembre 2022 jusqu’à octobre 2023.
Exposition compris dans le prix d’une visite libre.
Tarif plein : 7,50 € / Étudiant et enfant : 2,50€ / gratuit -8 ans.
Horaires
Du 1er novembre au 31 mars, le château est ouvert tous les jours de 10h00 à 17h00.
Du 1er avril au 31 octobre, le château est ouvert tous les jours de 9h30 à 18h00 sauf le samedi (fermeture à 17h00).
Plus d’infos sur www.closdevougeot.fr