Vignerons, chercheurs et élus de Dijon métropole ont lancé une expérience inédite ce vendredi 24 janvier : faire vieillir 80 bouteilles de vin dijonnais, immergées dans le réservoir Darcy, pendant dix ans.
Vieillir du vin sous l’eau pendant dix ans, ça fait quoi ? Le réservoir Darcy, situé sous le jardin du même nom, sera l’antre d’une expérience avec 80 échantillons de vin de Dijon. Ces flacons sont issus des Domaines du Tumulus et Manuel Olivier (Bourgogne Dijon rouge et blanc 2022), et du Domaine de la Cras (Bourgogne rouge 2022 et Bourgogne « Côteaux de Dijon » rouge 2022). De nouvelles bouteilles pourraient rejoindre cette cave immergée en cours de projet…
Chercheurs, vignerons et élus main dans la main
« L’idée est née dans ce même réservoir, autour d’un verre, pendant une session des Jeudis vin (ndlr, un atelier dégustation proposé par Dijon Bourgogne Tourisme & Congrès) », se souvient Antoine Hoareau, vice-président de Dijon métropole en charge de l’eau. Une discussion avec Jean-Luc Theuret, et le projet est lancé. « Nous voulons faire un focus sur le vin et les vignerons de Dijon, et montrer qu’il existe autour de la ville tout un microcosme universitaire et scientifique ». Le président de l’association des vignerons du Bourgogne Dijon (AVBD) peut compter sur l’appui de trois acteurs : Dijon métropole, le Centre des sciences du goût et de l’alimentation, et le laboratoire Procédés alimentaires et microbiologiques de l’Institut Jules Guyot.
Une expérience inédite dans le réservoir Darcy
Cela ne va pas sans nous rappeler un vin qui vient de prendre le large. Le voilier-cargo Grain de Sail II transporte deux fûts de chardonnay sur l’océan Atlantique pour en analyser l’impact des vagues, et ce pendant deux mois. Des résultats différents sont attendus dans le réservoir Darcy.
Ici, l’expérience concerne des vins en bouteilles, déjà élevés, et devrait durer dix ans. Des études porteront par exemple sur le rôle du bouchon dans cette situation : « Nous voulons analyser le vieillissement du vin dans cet environnement inhabituel », explique le président de l’AVBD. Il sera question « d’évaluer les effets et impacts de la conservation sous l’eau (pression, inertie thermique, modification des échanges gazeux) sur le vin et son évolution ».
« Nous avons cette envie de comprendre en quoi l’immersion sous l’eau peut différer de l’immersion en cave. Pour cela il faut assurer une obscurité et une température constante comme ici, explique Régis Gougeon, chercheur de l’Institut Jules-Guyot. Il existe déjà une cinquantaine d’initiatives dans le monde, mais c’est la première à alterner entre eau et air libre. Des viticulteurs disent que le fait d’émerger des bouteilles va accélérer le vieillissement. Or, nos travaux montrent que ce serait plutôt l’inverse. » Réponse dans dix ans !
Chaque hiver, le réservoir Darcy est vidangé. L’occasion pour les chercheurs de prélever quelques bouteilles par an pour en analyser les propriétés œnobiologiques.
Mettre en avant les vins de Dijon
Ce vin ne sera pas commercialisé. Néanmoins, Jean-Luc Theuret compte sur cette expérience scientifique pour mettre un nouveau coup de projecteur sur les vins dijonnais, alors qu’un dossier d’appellation traine sur les bureaux de l’Inao depuis plus de deux ans.
Deux week-ends par an, le réservoir Darcy ouvre ses portes au public pendant sa vidange hivernale (entre fin novembre et début décembre). Dès l’an prochain, il sera possible de découvrir l’état des bouteilles conservées sous le jardin Darcy.