Avec le dérèglement climatique, les récoltes de raisins font le yoyo, mais les vins de Bourgogne tirent toujours leur épingle du jeu, nationalement et internationalement.
Fichue flotte ! Pour le vignoble bourguignon, 2024 restera marquée par des pluies hors du commun, de 37 % supérieures à la norme, avec, comme corollaire, de fortes attaques de maladies, mildiou notamment. « Cette année, très compliquée, le vigneron devait être dans ses vignes tous les jours pour répondre aux forts aléas climatiques. C’est une vraie année de vigneron », estime François Labet, président délégué du Bureau interprofessionnel des Vins de Bourgogne (BIVB), lors d’une conférence de presse le 15 octobre.
Malgré le savoir-faire des exploitants, les intempéries ont lourdement frappé les vignobles de l’Yonne, de l’Auxerrois et du Chablisien, avec des baisses de rendement impressionnantes : -70 % autour d’Auxerre, -50 % à Chablis, -50 % pour les rouges de la Côte-d’Or, et -25 % pour les blancs. La Côte chalonnaise semble être la seule région relativement épargnée. « Nous pensions avoir atteint un plancher en 2021, mais nous risquons de récolter encore moins cette année », a averti François Labet. Les estimations actuelles, fondées sur des sondages auprès de plusieurs exploitations, seront précisées lors de la vente des vins de Beaune en novembre. La récolte 2021 s’élevait à environ 950 000 hectolitres, bien en deçà de la moyenne habituelle de 1,5 million d’hectolitres. Les variations climatiques sont désormais la norme : « C’est la nouvelle réalité avec laquelle nous devons composer », a souligné Laurent Delaunay, président du BIVB.
Un millésime riche et solide pour les rouges
Malgré ces pertes en volume, la qualité du vin est prometteuse. Les raisins, bien concentrés, ont profité de 15 jours de conditions idéales entre fin août et début septembre. « Le miracle bourguignon a eu lieu, avec 15 jours de soleil à la fin août et au début septembre, qui ont permis le mûrissement du raisin. Comme disait mon grand-père, c’est septembre qui fait le vin », analyse Laurent Delaunay. Le gel et la grêle ont certes réduit le nombre de grappes, mais le raisin, petit, a pu concentrer ses arômes et son sucre. Le vin sera de qualité assure la profession. « Nos blancs seront dans la ligne de ceux de l’année 2022, et nous aurons un millésime riche et solide pour les rouges, que j’oserais comparer au grand millésime qu’a été 2010 », estime François Labet.
Sur le plan économique, le vin bourguignon continue à tirer son épingle du jeu. Les stocks, soutenus par les abondants millésimes de 2022 et 2023, sont élevés, atteignant 2,9 millions d’hectolitres. Contrairement à la tendance générale, les ventes de vins de Bourgogne en grande distribution progressent (+2,9 % en volume et +2,6 % en valeur sur les huit derniers mois), alors que le marché national du vin connaît un déclin (-5,3 % en volume et -6 % pour les AOC).
À l’export, la Bourgogne continue de prospérer, avec une hausse de 3 % en volume et une stabilité du chiffre d’affaires (+0,2 %), dans un contexte mondial difficile où les exportations françaises d’AOC chutent de 6,9 %. « La baisse de consommation mondiale, notamment des vins rouges, nous oblige à rester prudents. La Bourgogne bénéficie de plusieurs facteurs favorables : nous produisons majoritairement des vins blancs, moins touchés par cette baisse. Nos rouges, élégants et frais, correspondent parfaitement à la demande actuelle », analyse Laurent Delaunay. Sur les six premiers mois de l’année, 44,6 millions de bouteilles de Bourgogne ont été exportées, générant 755 millions d’euros.
🍷 Les vins de Bourgogne en chiffres
La Bourgogne produit, en moyenne, 1,49 million d’hectolitres de vin, à 62 % blancs, 27 % rouges et rosés, et 12 % crémants. Sur les 201,9 millions de bouteilles produites en moyenne ces 5 dernières années, la moitié part à l’export. En France, près d’une bouteille sur deux est vendue par la grande distribution, la majorité s’écoulant via les circuits traditionnels (caviste, restaurants, achats à la propriété). Les vins de Bourgogne génèrent 2,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires.