Matignon a donc bien vendu une partie de sa cave pour abonder le budget de fonctionnement du premier des ministères. 173 000 euros, c’est mieux que l’estimation des experts (100 000 euros), mais beaucoup moins bien que ce qu’a fait l’Elysée sur le même terrain. Banalité s’il en est, une romanée-conti 2004 s’est envolée pour la Chine.
La vente aux enchères d’une partie de la cave de l’Hôtel Matignon, (10% soit un lot de 1 400 bouteilles) on vous en causait pas plus tard que vendredi dernier, jour de la saint-Nicolas. Histoire de montrer aux citoyens que dans les sphères politiques on se sert aussi la ceinture en période de crise. Jean-Marc Ayrault avait en effet décidé que pour couvrir une partie des frais de fonctionnement de son ministère, il serait de bon ton de faire un effort, en l’espèce vendre quelques beaux flacons qui avaient de toute façon peu de chance de sortir des caves. Évalués à 100 000 euros, les vins ont finalement rapporté 173 488 euros et quelques leçons…
D’une part il semble que notre Premier ministre ait moins la cote que François Hollande puisqu’en juin dernier, les 1 200 bouteilles de l’Élysée estimées à 300 000 euros (oui, c’est le Président qui a eu l’idée le premier), avaient fait la culbute pour aboutir à une vente record de 720 000 euros. Mais, entre nous, avec qui auriez-vous envie de partager un bon gueuleton ? La bouille rondouillarde de Hollande ou le visage émacié de Ayrault ? L’habit ne fait pas le moine mais dans la vente la tronche du VRP y fait pour beaucoup… Premier Ministre, ça eût payé… ça paye plus…
Clou de la vente, une romanée-conti 2004 s’est envolée à 10 500 euros. Et envolée n’est pas une métaphore, puisque la bouteille du vin le plus désiré du monde (6 000 bouteilles par an seulement et des listes d’attente) s’est payé un aller-simple vers la Chine.
La France vend ses trésors comme Bécaud vendait ses sentiments … « M. Pointu s’il vous plaît … On brade, on liquide, on adjuge… » Certains expliqueront qu’il faut se réjouir que l’excellence française attire encore mais il fut un temps où pour apprécier le savoir-faire Français, il n’était pas nécessaire de se payer un aller-retour à Pékin ! Et que penser de ce coup de pub (les frais de fonctionnement de Matignon c’est au bas mot dix millions d’euros par an alors les 173 000 euros et des broutilles, vous voyez que ça va aller vite…) ? En dehors du fait qu’il faut de plus en plus avoir un pote Chinois si on veut se taper une (très) bonne bouteille (la pièce de charité lors de la vente des Hospices de Beaune à une Chinoise en est un autre exemple), va aussi falloir être super-convaincant quand on servira à un diplomate un Bergerac de la supérette locale. Mais ça peut-être un concept, comme le petit rouge-cassis du parti communiste français qui vous nettoie les boyaux telle une décoction de soufre. Pendant ce temps-là en Chine, plus grand pays communiste du monde, les 1er mai vont se fêter avec les grands crus français. Ah y’a rien de tel mon camarade que l’idéologie… Alors faire des économies oui, mais la dilapidation de ce qui est finalement une épargne d’image pour notre pays me rappelle cette citation de Sacha Guitry à propos des dépenses dispendieuses de nos gouvernants : « On prétend que nos rois dépensaient sans compter/Qu’ils prenaient notre argent sans prendre nos conseils/Mais quand ils construisaient de semblables merveilles/Ne nous mettaient-ils pas notre argent de côté ? »