« Chemin faisant » pourrait être le sous-titre de cette nouvelle chronique VRP (un Village, une Route, un Patrimoine) qui nous entraîne sur les petites routes de Côte-d’Or, à la découverte de nos richesses. Pour cette première, destination Fontaine-Française, à une quarantaine de kilomètres au nord-est de Dijon via la D960.
Par Michel Giraud – Photo : Pays plaine de Saône Vingeanne
A peine passé le village de Bourberain et son château aux volets verts, s’ouvre à nous un boulevard de bitume, une grande ligne droite de macadam qui foule la campagne, au cœur du Val de Vingeanne. La forêt de Velours n’est qu’à deux pas de là, et bientôt se dressera sur notre route vers Fontaine-Française. En arrivant dans le bourg, impossible de manquer le château qui toise un imposant plan d’eau. Construit en 1754 par Marie-François Bollioud de Saint-Julien, receveur général du clergé de France, ce manoir de style classique, érigé à l’emplacement d’une ancienne forteresse du XIe siècle, a accueilli des personnalités comme Voltaire et Madame de Staël. Mais à vrai dire, ce n’est pas là que nous nous attarderons. A la sortie de Fontaine-Française, en direction de Gray et de la Haute-Saône toute proche, c’est un étonnant arc de triomphe qui se dresse sur la droite de la D960, quelques centaines de mètres seulement avant de franchir le canal de la Marne à la Saône, que nous appellerons désormais « Entre Champagne et Bourgogne ». Ce surprenant édifice devance un lavoir de 1807 ouvert à tous vents, dont le toit est soutenu par dix colonnes massives: la fontaine Henri IV.
Mais revenons à nos livres d’histoire: juin 1595, le connétable de Castille franchit les Alpes à la tête d’une armée forte de 12 000 hommes venus des garnisons d’Italie et de Sicile. A Besançon, il est rejoint par la petite troupe du duc Charles de Mayenne, chef de la Ligue catholique. Ensemble, ils se dirigent vers Dijon afin de reprendre la ville. Henri IV, prévenu de leur arrivée, accourt de Troyes avec les 3 000 hommes qu’il a réussi à rassembler.
La confrontation a lieu le 5 juin 1595, à Fontaine-Française: Henri IV, parti en éclaireur, tombe prématurément sur les troupes espagnoles. Il les charge et contre toute attente les oblige à battre temporairement en retraite. Après cette attaque, Henri IV décide de recruter parmi les habitants du village, des paysans principalement, et de les armer de faux ou de tout objet métallique qui peut briller au soleil. Il regroupe ensuite tout ces soldats de fortune sur la petite colline tenue par ses troupes militaires et les fait manœuvrer, laissant croire à l’ennemi l’arrivée de renforts venus de Dijon.
Le connétable de Castille, trompé par la ruse d’Henri IV, décide finalement de rebrousser chemin. Cette victoire gagnée durant la huitième guerre de religion marque la fin définitive de la Ligue, un des plus grands dangers rencontré par la monarchie française avant l’avènement de l’absolutisme. C’est donc pour rendre hommage au roi que fut construit cet arc de triomphe – aujourd’hui devenu la « fontaine Henri IV » – en bordure de route.
