Professeure de piano installée à Beaune, la musicienne de formation classique assure, avec son duo Abélard, la première partie du mythique groupe de métal industriel allemand pour le Europe Stadium Tour 2024.
Par Bertrand Carlier
Yolande Kouznetsov est certes une habituée des scènes européennes. Celles des théâtres et auditoriums, où le public écoute religieusement ses interprétations de Gershwin ou Rachmaninov, avec une jauge maximale à 2 000 personnes. Aujourd’hui, la professeure de piano beaunoise se retrouve sur un plateau posé au cœur d’une foule en délire. « On a l’impression de jouer au milieu de l’océan ! »
69 000 personnes à Prague. Deux fois. Puis quatre fois 60 000 à Dresde. Belgrade, Athènes, Barcelone ou encore le stade Vélodrome… « Ça chiffre vite » : en moins de trois mois et une trentaine de dates du 12 mai au 31 juillet, la pianiste se sera produite devant plus d’un million et demi de spectateurs.
« Une expérience incroyable »
« Je réalise un rêve que je pensais impossible. Jouer avec des costumes extravagants sur scène, recevoir autant de chaleur humaine, faire le show devant des gens qui crient des I love you, signer des autographes en passant dans le corridor, taper dans les mains… c’est quelque chose qu’on n’a pas en musique classique. On est en train de vivre une expérience incroyable, semblable à celle des grandes stars de la pop. »
Fille et petite-fille de pianistes russes, Yolande Kouznetsov, « tombée dans la marmite », est passée par le conservatoire national de Lyon, ville où elle co-dirige le Concours international de Piano depuis bientôt seize ans. C’est en suivant son mari, ingénieur au Creusot, qu’elle a posé le pied, puis ses cartons, à Beaune il y a près de cinq ans. « Un jour de festival Jazz O’Verre : des groupes partout, des touristes, les terrasses des restos ouvertes : je me suis dit « je veux vivre ici ». Ça a vraiment été un coup de cœur. »
Quelques bourgognes dans les valises
Sa vie a changé lorsqu’une ancienne camarade de promo, Héloïse Hervouët, l’a contactée pour la rejoindre cette année : la fondatrice du duo Abélard avait besoin d’un binôme pour poursuivre l’aventure Rammstein, commencée en 2019 avec le remplacement d’un groupe sur quelques dates. « Le public accrochait, le duo est resté. »
En première partie de chaque concert, Abélard interprète des covers du groupe à deux pianos. « Des arrangements conçus par Jonas Atlan, qui sort du conservatoire supérieur de musique de Paris. Des très belles pièces qui rendent hommage aux originales mais montrent aussi toute notre technicité en tant que professionnelles. C’est une manière d’introduire, d’ouvrir des portes sur le monde du classique et, inversement, sur le monde du métal. »
Un concert de Rammstein c’est, au-delà de la musique, un véritable show avec pyrotechnie, une scène qui monte… « Quelque chose de grandiose : quand on passe derrière, on a l’impression d’être dans un parc d’attraction avec des grands huit. » Vers la fin de « l’opening act », le groupe rejoint les filles : « Ils chantent avec nous qui les accompagnons au piano, puis partent vers la grande scène en canoë. »
Les métalleux allemands « nous ont accueillies avec beaucoup de gentillesse, on a eu l’occasion de boire des pots ensemble », confie Yolande, qui ne manquera pas de remplir son rôle d’ambassadrice de sa région d’adoption : « J’ai emmené quelques bourgognes avec moi, on va les goûter. »